Le dimanche 18 juin 1854, un important épisode de tornades frappe la Belgique et les Pays-Bas. Le plus remarquable, c’est que les tourbillons ont atteint de fortes intensités, de niveau F3 voire même davantage. En Belgique, on dénombre 5 morts et au moins 9 blessés.
Le premier tourbillon est signalé aux Pays-Bas, des environs de Rotterdam à Dordrecht. Ensuite, une autre tornade est observée en Belgique entre Bourg-Léopold et Zolder dans la province de Limbourg. Cependant, des dégâts sont déjà mentionnés bien avant, à Beerse.
Après, un autre vortex semble avoir sévi à Herselt, en province d’Anvers. En amont, des dommages sont déjà mentionnés à Wijnegem, à l’est d’Anvers. Enfin, une dernière tornade frappe Breisem et Kumtich, en province du Brabant (Flamand de nos jours). À ce propos, il n’est pas impossible que la tornade de Herselt ait dévié pour atteindre cet endroit, mais aucun détail ne permet de l’affirmer.
Voici, à présent,drc quelques extraits de journaux d’époque qui relatent ces faits :
« On écrit de Louvain, le 20 juin : il est presque impossible de décrire ou d’évaluer les dégâts que vient de faire, dans l’après-dinée de dimanche passé, une espèce de trombe ou coup de vent qui a éclaté sur les villages de Cumptich et de Braessem, entre Louvain et Tirlemont.
À Cumptich, le toit entier de la grange du sieur Peutens a été enlevé en moins d’une minute et lancé dans les champs à 50 mètres de distance. Entre Cumptich et Braessem, sur une largeur constante d’environ 40 à 50 mètres de terrain, les arbres fruitiers des vergers, les chênes, les ormes, les peupliers longeant les chemins, ont été coupés non pas à rase de terre, mais à 3 ou 4 pieds du sol et emportés par le vent, quelques-uns à plus de 5 minutes de distance.
Une vingtaine de maisons sont privées de toits. Cinq ou six habitations de fermiers, dont deux construites en briques, ont été littéralement renversées comme un château de cartes et aplaties sur le terrain, si bien qu’il ne reste plus qu’un monceau de décombres.
L’église de Braessem a été coupée en deux perpendiculairement à sa longueur. Elle conserve sur pied sa tour et le chœur. La partie intermédiaire est entamée et le toit jeté on en sait où. On a trouvé également dans les champs, les ailes d’un moulin à vent, situé à deux lieues de Cumptich.
Le coup de vent n’a pas duré 5 minutes. Il n’était accompagné ni de tonnerre ni d’éclairs, mais d’une forte pluie. Il n’a pas côtoyé le sol, car les blés et les pommes de terre ne sont qu’effleurés. C’était une véritable trombe, puisque des arbres rapprochés sont le plus souvent lancés dans des directions opposées.
Dans un bas-fond non loin de l’église de Braessem, des peupliers couchés par le vent au-dessus d’un ravin profond, forment en ce moment-ci un pont très convenable.
On parle de deux enfants enlevés par le vent et qu’on n’a pas retrouvés jusqu’ici. On ne cite pas d’autres cas de mort ou de blessures graves. Il pleuvait énormément et c’est à cette circonstance que l’on doit la vie de beaucoup de personnes, la plupart étant rentrées chez elles.
Les paysans qui ont vu la rafale opérer ses ravages disent qu’elle était précédée d’une nuée d’oiseaux fuyant le vent dans tous les sens. Des portes, des châssis, d’énormes branches d’arbres, des milliers de pierres, briques, pannes, tuiles ont passé comme un tourbillon et se retrouvent maintenant éparpillés dans les champs, sur une longueur de plus d’un quart de lieue. De mémoire d’homme, on ne cite pas un coup de vent aussi extraordinaire, il est probable que Cumptich et Braessen ne sont pas les seuls villages éprouvés ! »
« Une trombe a dévasté en partie le camp de Beverloo. La toiture de l’église est fort endommagée. » (Le Bien Public 23/06/1854)
« La trombe de dimanche dernier a causé de grands dégâts dans le Brabant Septentrional. Le vent a fait plusieurs trous dans le toit de l’hospice des vieillards à Breda et a cassé les vitres de plusieurs maisons. À Gelder et au Hout, l’ouragan a laissé également des traces de son passage ; au Raamdonksche Veer une maison avec une grange a été emportée et les débris jetés à une grande distance ; plusieurs autres habitations ont perdu leur toiture. L’ouragan a sévi aussi à Haastrecht, Ridderlerk et Dordrecht. » (Journal de la Belgique : pièces officielles et nouvelles des Armées – 26/06/1854)
« On nous écrit de Bourg-Léopold, le 20 juin : notre commune a été, avant-hier 18 juin, littéralement ravagée par une trombe épouvantable. Les effets de l’ouragan commencèrent à se faire sentir vers cinq heures moins un quart de l’après-midi, et prirent bientôt des proportions tellement effrayantes que de mémoire d’homme on ne se rappelle pas avoir rien vu de semblable. Des pans de mur renversés, des toitures enlevées, des vitres brisées, des portes arrachées de leurs gonds, des clôtures détruites, des arbres entièrement déracinés, ce ne furent là que les premiers désastres causés par la tempête.
Des accidents d’une nature plus grave vinrent bientôt s’ajouter à ceux-ci :
Les fidèles se trouvaient en ce moment réunis en grand nombre à l’église pour assister à l’office du salut. Tout à coup le vent s’engouffre violemment sous la toiture de l’édifice, la détache de la charpente et la lance dans le cimetière attenant, où elle vient se briser après avoir fracassé dans sa chute les tilleuls et les peupliers qui entourent l’église. En même temps, une des portes de la sacristie était jetée par l’ouragan dans l’intérieur du temple, et les candélabres, les vases sacrés, etc. roulaient sur le sol, fortement endommagés. Heureusement, malgré le trouble et le désordre inséparables de pareilles circonstances, il n’y a pas d’accident grave à déplorer, et tout se borne à quelques contusions légères reçues dans la débâcle qui précéda l’évacuation de l’église.
Les autorités civiles et militaires ont pris sur-le-champ d’énergiques mesures pour mettre les richesses intérieures du temple à l’abri de plus grands dégâts. Le bâtiment de la cure et la nouvelle maison des postes ont également beaucoup souffert.
La trombe charriait avec elle une quantité d’objets qu’il était impossible de distinguer avec précision ; cependant, on a pu reconnaître des joncs et du chanvre roui. Il parait, d’ailleurs, qu’elle a aussi porté ses ravages sur d’autres points de la contrée et notamment à Heusden, Zolder, Coursel, Stal et Copsel. On parle de maisons détruites, de bois entiers de jeunes sapins jetés sur le sol, de familles ensevelies sous les décombres de leurs habitations. Enfin, si la rumeur publique est vraie, des faits plus douloureux encore se seraient passés à Herselt : il ne s’agirait de rien de moins que plusieurs victimes et d’une quarantaine de maisons en ruine. » (Journal de la Belgique : pièces officielles et nouvelles des Armées – 22/06/1854)
« Le Constitutionnel du Limbourg belge contient quelques nouveaux détails sur la trombe de dimanche dernier. Les voici :
Dimanche dernier, vers 4 heures de relevée, un ouragan des plus effrayant, et des plus extraordinaire est venu mettre en émoi toutes nos contrées. Ayant pris naissance aux confins des communes de Lummen, Zelder, la trombe a parcouru les communes de Heusden, Coursel, Beverloo, Bourg-Léoppold, etc. sur une largeur d’environ 20 mètres, tout le long de la route indiquée, rien n’est pour ainsi dire resté. Bois, arbres, récoltes, moissons, tout a été, sinon entièrement dévasté, au moins fortement endommagé.
À Heusden, une maison a été entièrement enlevée et le toit a été emporté à une distance de plus de 15 minutes. Là, nous avons de malheureux accidents à enregistrer. L’homme de la maison est dangereusement blessé et son état inspire de sérieuses inquiétudes ; de plus un enfant à la jambe fracturée.
Sous Coursel et Beverloo une vingtaine de maisons ont succombé à la violence de la trombe ; avec peine, on peut en découvrir la première existence.
À Bourg-Leopold, l’élément dévastateur n’a pas moins exercé ses ravages. Le toit de l’église, du côté du nord, a été entièrement enlevé ; pas une seule planche n’est restée. Plusieurs maisons au centre de la commune ont fortement souffert. Décrire le tumulte et l’épouvante qu’occasionnait cette catastrophe, vu que c’était pendant le salut, est impossible. Tout le village était en émoi pour se sauver de droite à gauche. Les pertes sont considérables et sans le passage rapide de la trombe, on aurait eu plus de grands malheurs à déplorer.
Des chênes, gros de plus d’un mètre, ont été déracinés, entièrement coupés et brisés. Une famille de cultivateurs à Heusden s’est trouvée ensevelie sous les décombres de son habitation. Heureusement, la trombe par une saccade subséquente, a de nouveau renversé et jeté au loin la toiture qui les recouvraient, et ces pauvres gens ont pu être sauvés. Cependant, le père et deux enfants se trouvent dans un état alarmant.
Si ce que l’on nous rapporte à l’instant se confirme, de plus graves accidents encore ont signalé un pareil ouragan le même jour à Herselt (province d’Anvers). On parle d’une quarantaine de maisons en ruine et de plusieurs victimes ». (Le Messager de Gand 25/06/1854)
« Les journaux hollandais sont remplis de tristes détails concernant les dégâts occasionnés par une trombe qui a passé, le 18 juin, par plusieurs communes situées aux environs de Rotterdam et de Gorcum, et qui a laissé partout des traces désolantes de son passage. À Raamsdonk, près du bac de passage, l’ouragan a renversé une maison avec la grange attenante ; plusieurs autres habitations ont été violemment privées de leur toiture. À Ridderkerk, la trombe était accompagnée d’une pluie torrentielle ; un homme y a été sérieusement blessé par des tuiles envolées à une hauteur prodigieuse et retombant avec une force incroyable. À Giessendam, à deux lieues de Goreum, les toits des maisons et de l’église ont été dépouillés de leurs tuiles, et des arbres séculaires arrachés du sol. » (La Nation 25/06/1854)
« On écrit d’Anvers, le 19 juin : une averse diluvienne est tombée hier entre 5 et 6 heures du soir sur la ville et les environs. On assure que dans les environs de Wyneghem, bon nombre d’arbres ont été aussi déracinés par la violence du vent. À Beerse, l’ouragan a renversé une grange et déraciné plusieurs arbres fruitiers et autres. En la commune de Hersselt, la trombe a causé des dégâts considérables ; quatre maisons avec écuries, y ont été complètement détruites, dix toitures de diverses maisons enlevées par le vent et une grande quantité d’arbres arrachés et brisés. » (Le Messager de Gand 21/06/1854)