Le 28 mai 2000, une dépression de petit diamètre se creuse brutalement au-dessus de la Manche et prend la direction des Pays-Bas. Imprévue, elle donne une véritable tempête sur les côtes allant du nord de la France aux Pays-Bas. Il s’agit même de tempêtes « jumelles » puisqu’une première tempête, de même nature mais moins puissante, a déjà sévi la veille. En Belgique, seul le littoral a temporairement connu du vent fort avec, le 27 mai 2000, une rafale de 94 km/h en matinée.
Il en va tout autrement du 28 mai 2000, où une véritable « Kanaalrat » (terme néerlandais pour désigner une dépression traîtresse passant par la Manche) arrive à l’entrée de la Manche vers minuit. Ensuite, la dépression se creuse encore davantage en pénétrant dans le « Canal de la Manche », puis se trouve le matin déjà au-dessus du « Pas-de-Calais » avant de poursuivre sa route sur le sud de la Mer du Nord. Un système frontal complexe lui est associé. Ce système s’occlut (occlusion à caractère de front froid) avant d’arriver en Belgique, si bien que notre pays ne connaît pas de hausse de température liée au secteur chaud.
Situation synoptique du 28 mai 2000.
Source : Daily Weather Summary, The Met. Office
En d’autres termes, il fait frais, trop frais pour la saison avec des maximas en plaine le plus souvent compris entre 12 et 15°C, très localement 16°C. Le temps est d’abord couvert et pluvieux avec nimbostratus (parfois aussi altostratus épais et stratocumulus), ensuite il devient rapidement plus instable avec un mix de stratocumulus et de nuages convectifs donnant des averses. Les éclaircies ne se développent souvent que l’après-midi, avec des cumulus et cumulonimbus devenant plus visibles. Les plus fortes averses, parfois accompagnées de grêle, font rebaisser la température jusqu’à 7-8°C.
Le vent souffle fort, avec les rafales maximales souvent atteintes vers midi, un peu plus tôt sur l’extrême ouest, un peu plus tard sur l’extrême est. En bien des endroits, on dépasse les 100 km/h, comme par exemple au port d’Ostende (112 km/h), à Middelkerke (101 km/h), dans la zone industrielle de Gand (108 km/h), à Zaventem (104 km/h) et à Kleine Brogel (108 km/h). On note aussi les 104 km/h de Cadzand (NL), tout près de Knokke. Du côté français, mais pas encore très loin de la Belgique, on relève 133 km/h à Boulogne et 119 km/h à Dieppe.
Dès l’après-midi, au littoral, et en soirée ailleurs, les averses s’organisent en une véritable ligne orageuse (perturbation post-frontale) avec de nouvelles fortes rafales. Entre 17 et 18 heures, les rafales redépassent les 100 km/h à Middelkerke (à nouveau 101 km/h). En outre, contrairement à la mi-journée, où il s’agissait d’une tempête purement synoptique, ces rafales-ci sont d’origine convective. Ailleurs dans le pays, même si aucun point de mesure officiel n’a enregistré de rafales significatives dans le cadre de cet événement orageux, il va de soi que de très fortes rafales, peut-être même plus fortes que celles de la tempête synoptique, ont pu avoir lieu ici et là.
Au littoral et sur l’ouest de la Belgique, l’activité orageuse se poursuit une bonne partie de la nuit, tandis que plus loin vers l’intérieur, l’instabilité s’estompe rapidement. Dans la partie sud du pays, l’épisode venteux dans son ensemble a été de moindre importance et les températures, aussi moins fraîches. À Virton, la température a atteint 16°C.
On dénombre de nombreux dégâts sur la végétation dans tout le pays. En effet, les arbres possédant déjà leurs feuilles, ils offrent une meilleure prise au vent qu’en hiver.
Qu’est-ce qui a rendu cette tempête si remarquable ? En premier lieu, le fait qu’il s’agissait d’une tempête d’hiver qui s’est produite à un moment de l’année tout à fait inhabituel. Mais il y a aussi des facteurs subjectifs : cette tempête s’est produite un dimanche avec un maximum venteux en plein milieu de la journée. Beaucoup de gens étaient dehors à ce moment-là et de nombreuses activités en plein air étaient organisées. Marc Vandiepenbeeck, dans son article « Le vent : la tempête du 28 mai 2000 » publié dans « Ciel et Terre », précise ceci : « Alors que peu de gens ont retenu les grands vents des 3 et 4 mai 1987 et du 9 mai 1992, on retiendra certainement mieux cette journée tumultueuse du 28 mai 2000 ».