Le 11 mai 2021, on retrouve un talweg, déjà lié aux orages du 9 mai, qui s’étire du Golfe de Gascogne aux Îles britanniques. Ainsi, avec l’existence d’un air relativement froid en altitude, l’instabilité augmente en cours de journée, avec des températures qui atteignent entre 12°C et 20°C en Belgique. Toutefois, l’instabilité reste modeste, tournant autour de 500 J/kg sur le centre et l’ouest du pays.
En basses couches, aucun flux ne se démarque, si bien qu’on s’attend à des développements convectifs peu mobiles et organisés de façon anarchique, à la manière de ce que l’on peut observer dans des conditions de marais barométriques.
Cependant, une certaine dynamique est présente en altitude, un peu plus marquée sur l’ouest de la Belgique. De plus, nous nous situons sous un flux divergent. Certaines cellules peuvent donc être amenées à évoluer en des orages présentant une bonne activité. Pourtant, à la surprise générale, c’est une supercellule qui sévit en fin d’après midi dans la région d’Ypres, en province de Flandre Occidentale.
Il est fort probable que cette supercellule ait bénéficié de conditions très locales et favorables à son développement. Déjà, les températures maximales sont atteintes justement dans cette région, apportant une instabilité supérieure. On mesure ainsi 20,7°C à Izegem en province de Flandre Occidentale et 20,1°C à Avelgem en province de Flandre Orientale et à Lille (France).
Carte illustrant la direction des vents près du sol, le 11 mai 2021 à 17h00. On remarque une convergence
entre trois vents de direction différente dans la région de Lille – Ypres. Source : Infoclimat
Tout commence en début d’après-midi, avec l’observation de quelques cellules orageuses anecdotiques sur le Hainaut, près de Bruxelles et sur le Condroz liégeois. À 16h15, d’autres orages apparaissent près des frontières mitoyennes entre la Flandre Orientale et Occidentale, sur le front de brise de mer. Leur activité est plus importante, sans pour autant se démarquer.
Néanmoins, un tuba est observé dans la région de Maldegem en province de Flandre Orientale. Aucun contact avec le sol ne semble toutefois avéré. Cela reflète tout de même qu’un certain cisaillement est présent, notamment dans les basses couches. Autour de 17h15, ces orages se dissipent.
Au même instant, une cellule orageuse démarre au sud de Lille, avant de se déplacer vers le nord-ouest de l’agglomération. À 17h45, alors que quelques cellules se développent sur les Ardennes flamandes (Mont de l’Enclus), l’orage lillois arrive à la frontière belge au moment où il semble adopter des caractéristiques supercellulaires (structure en V visible sur les images radar), bénéficiant des conditions locales précisées auparavant.
Près du Mont de l’Enclus, un de nos observateurs suit l’évolution des cellules s’y développant. Il remarque la présence de deux noyaux orageux qui interagissent entre eux par les outflows, soit les flux d’air sortant des cumulonimbus, créant par moment des structures intéressantes et dynamisant les courants ascendants.
Courant ascendant d’une cellule orageuse depuis Anseroeul, en province de Hainaut, le 11 mai 2021 vers 17h30.
Ces deux orages interagissent également avec l’orage de Lille. D’ailleurs, ce dernier semble subir un split-storm. Le moteur droit se déplace vers le Hainaut en décrivant un petit arc de cercle, tandis que le moteur gauche avance en province de Flandre Occidentale.
Les deux moteurs semblent présenter des signes d’évolution supercellulaire sur les radars, tandis qu’ils se déplacent lentement. Ainsi, les précipitations sont soutenues et mènent à des cumuls de 20 mm voire davantage, causant des inondations de voiries. Cependant, aucune station ne se trouve sur leurs trajectoires (maximum de 13,8 mm à Avelgem).
Le moteur droit finit par entrer en collision avec les cellules présentes sur les Ardennes flamandes, et fusionne avec celle qui se trouve vers Celles.
Le moteur gauche semble bien plus actif et montre des belles structures avec même un nuage mur bien développé. Ainsi, il semble que cette cellule connaisse une réelle évolution supercellulaire, du moins temporairement, avec une rotation consistante de son courant ascendant. En outre, l’activité électrique est soutenue.
Nuage mur d’une supercellule moteur gauche à Poelkapelle, en province de Flandre Occidentale, le 11 mai 2021 vers 18h30.
Crédit photo : Laura Georgiana Repciuc
Des chutes de grêlons d’environ 2 cm de diamètre sont observées, blanchissant complètement le sol par endroits, notamment à Zonnebeke et Comines. Pour finir, les cellules s’effondrent rapidement vers 19h15 peu avant Houthulst d’un côté et au-dessus de Celles de l’autre.
Nous vous invitons à consulter le lien suivant qui mène à une vidéo de la supercellule moteur gauche à Ypres : Hans Biesbrouck – Severe Weather in Belgium