Durant ce mois de septembre orageux en Belgique, une nouvelle dégradation nous parvient le samedi 13. Localement, des dégâts sont observés à la suite de fortes rafales de vent, de chutes de grêle et des pluies intenses dans le sillage d’un orage supercellulaire qui a traversé le centre du pays. Il est d’ailleurs responsable de dommages importants à Tongres, en province du Limbourg.
Au niveau des conditions atmosphériques, cette journée est marquée par le passage d’un front occlus d’ouest en est, piloté par une dépression centrée sur l’Écosse. En altitude, nos régions se trouvent en entrée gauche d’une branche de jet, mais les cisaillements restent relativement faibles. Ainsi, malgré une instabilité proche des 1000 J/kg, rien ne laissait réellement présager la survenue de ce type d’orage.
Ainsi, dès le début de l’après-midi, de multiples noyaux orageux se greffent sur le front. Mais une cellule se démarque de l’ensemble par son caractère supercellulaire, et ce, depuis sa naissance en milieu d’après-midi dans la région de Cambrai, en France. En effet, cette dernière s’isole rapidement et dévie du flux général en entrant en Belgique par la province de Hainaut. Au nord-est de Charleroi, l’un de nos membres observe d’ailleurs un nuage-mur et une rotation marquée de l’orage, ce qui confirme cette évolution. De plus, vers 17h30, des chutes de grêlons d’un diamètre de 3 à 4 centimètres sont remarquées dans la région de Gembloux, en province de Namur. Quelques inondations par ruissellement sont aussi signalées sur la trajectoire de la cellule, mais, dû à son déplacement rapide, les dommages sont limités. Cependant, on observe localement la présence de quelques dégâts à la végétation, avec notamment des branches brisées. Une demi-heure plus tard, un autre membre de Belgorage observe le passage du courant ascendant depuis Ramillies, en province du Brabant wallon, toujours animé d’une rotation bien marquée. En outre, quelques chutes de grêlons de 2 à 3 centimètres sont aussi observées.
Orage supercellulaire transitant par la région de Ramillies, en province du Brabant Wallon, le 13 septembre 2025.
Ensuite, la supercellule va faiblir en entrant en province de Liège. Néanmoins, cette baisse d’intensité n’est que temporaire, car, au nord de Waremme, la cellule reprend brusquement vigueur en absorbant un autre développement convectif en provenance du sud. Quelques dégâts consécutifs à de fortes rafales de vent sont engendrés dans la région d’Oreye, avant que l’orage ne pénètre en province de Limbourg pour concerner la ville de Tongres vers 18h40. Cette dernière subit alors un violent phénomène venteux qui endommage une quarantaine de toitures d’habitations tandis que de nombreux arbres sont brisés ou déracinés. L’un d’entre eux s’est abattu sur une voiture, mais, heureusement, les occupants n’ont pas été blessés. On note également que les urgences de l’hôpital n’étaient plus accessibles à cause des arbres qui ont obstrué la voirie d’accès. Une enquête de terrain a été réalisée pour déterminer l’origine du phénomène, celle-ci étant détaillée ci-dessous.
Dégâts observés au parc de l’hôpital de Tongres, en province de Limbourg, le 13 septembre 2025.
Par après, la cellule semble perdre ses caractéristiques supercellulaires pour évoluer vers un orage multicellulaire de type écho en arc au moment d’atteindre la frontière néerlandaise autour de 19h00.
À l’arrière, d’autres développements orageux poursuivent leur traversée de la Belgique, en présentant parfois quelques caractéristiques supercellulaires, mais nettement moins marquées que précédemment. Localement, ces orages s’accompagnent aussi de fortes précipitations ainsi que d’une activité électrique marquée. Toutefois, aucun dommage n’est enregistré. On note cependant qu’un écho en arc s’est structuré en soirée sur l’Entre-Sambre-et-Meuse, pour ensuite balayer le sud de la province de Namur. Par après, l’activité générale va décliner avec la tombée de la nuit, mettant un terme à cet épisode d’arrière-saison.
Résultats de l’enquête de terrain
Suite à l’enquête de terrain menée le lendemain de l’épisode, nous avons mis la survenue de rafales descendantes en évidence. Les dégâts sont identifiables sur une trajectoire continue de 3 kilomètres et sur une largeur variable, qui est en moyenne d’environ 150 mètres pour les dommages les plus conséquents. L’intensité maximale est située au niveau T3 sur l’échelle de TORRO (vitesses des vents estimées autour de 150 km/h).
Carte reprenant une vue d’ensemble des dégâts inventoriés à Tongres, en province de Limbourg,
suite au phénomène venteux du 13 septembre 2025.
Fond de carte : Google Maps
La carte ci-dessus reprend les principaux dégâts recensés (points rouges) avec le sens du vent représenté par les flèches jaunes. Trois zones ont été identifiées dans lesquelles les dommages sont plus importants qu’ailleurs.
Dans la première zone, située entre la Kruissteenweg et la Legioenenlaan, les dégâts montrent bien des vents linéaires, mais assez perpendiculaires au sens de déplacement de l’orage. De nombreux arbres ont été déracinés ou brisés (chênes, tilleuls, peupliers), certains présentant une circonférence importante, comme c’est le cas pour un chêne qui s’est abattu sur un véhicule. On observe également une rangée de noisetiers déracinés ainsi que le recouvrement d’une façade d’une habitation complètement arraché.
Façade d’une habitation arrachée sur la Kruissteenweg, à Tongres, en province de Limbourg, le 13 septembre 2025.
Dans la seconde zone, de nombreuses branches ont été arrachées aux arbres le long de la Nationale 79, tandis que des arbres ont été brisés et déracinés sur la Sacramentstraat. Au moins une dizaine d’habitations ont vu aussi leurs toitures endommagées, avec la perte plus ou moins importante de la couverture de tuiles. Ici aussi, le vent a été bien linéaire, mais avec une orientation un peu différente que précédemment.
Arbres brisés ou déracinés dans la cour d’un établissement scolaire de la Sacramentstraat, à Tongres,
en province de Limbourg, le 13 septembre 2025.
Enfin, dans la troisième zone, 3 habitations ont vu leurs toitures en partie arrachées sur la Meulemanslaan et projetées à plusieurs dizaines de mètres, causant d’autres dégâts sur des véhicules et des façades d’immeubles sur la Heuveldal. Des morceaux d’isolation ont été retrouvés également à plus de 500 mètres de leur lieu d’origine, tandis que de nombreux arbres ont été déracinés dans le parc de l’hôpital. Une habitante de la Meulemanslaan nous livre son témoignage :
« Le ciel est devenu jaune-vert et, peu après, il s’est mis à pleuvoir et le vent a rapidement soufflé très fort, avec de la grêle. J’ai voulu alors fermer les fenêtres, mais j’ai eu du mal tellement le vent était fort ; c’était effrayant. Cela a duré 3 minutes, puis c’était fini. Quand nous sommes sortis pour regarder ce qu’il se passait, toute la rue était recouverte de débris. Les toits de nos trois voisins avaient disparu de leurs maisons. ».
Toiture d’une habitation en partie arrachée sur la Meulemanslaan, à Tongres, en province de Limbourg, le 13 septembre 2025.
Véhicule endommagé par des débris de toiture sur la Heuveldal, à Tongres, en province de Limbourg, le 13 septembre 2025.
Ainsi, bien que les vents semblent avoir été légèrement convergents localement, l’orientation des dégâts en sortie de la zone montre clairement une divergence marquée, ce qui confirme la survenue de rafales descendante. Aucun indice d’aspiration n’a d’ailleurs été identifié. De plus, contrairement aux zones précédentes, les dommages sont généralement orientés dans le sens de déplacement de l’orage.
Une théorie pour expliquer l’orientation parfois perpendiculaire des dégâts dans les deux premières zones serait que les rafales descendantes se soient produites dans le RFD de la supercellule. Ou encore, il semblerait qu’un phénomène de rotor se soit produit, notamment dans la dernière zone. Enfin, au vu du caractère urbain du territoire touché, l’orientation des bâtiments a sans doute également joué un rôle dans la direction des vents au sol. Cela a notamment été observé autour d’immeubles près de l’hôpital qui ont clairement interféré avec le flux, comme une pierre dans une rivière.