Durant la journée du mardi 20 mai 2014, des orages adoptant des structures différentes ont transité par la Belgique. Les premières zones touchées durant l’après-midi furent les provinces des Flandres Occidentale et Orientale où les orages furent le plus souvent isolés mais proches les uns des autres. De plus, l’un d’entre eux semble avoir adopté un comportement supercellulaire se caractérisant par un abaissement de son courant ascendant, celui-ci ayant même été jusqu’à la constitution d’un nuage mur temporaire. Bien entendu, la plupart de ces orages ont été accompagnés par des phénomènes associés intenses surtout au niveau des précipitations qui furent constituées de pluie, grésil et même de grêle sous les cellules les plus vigoureuses.
Chute intense de petite grêle sous une des cellules orageuses.
Crédit photo : Jean-Yves Frique
Toujours sur la même zone, une autre cellule bien organisée est remontée depuis le nord de la province de Hainaut en direction de la Flandre Orientale en provoquant elle aussi de très fortes précipitations sur son passage. Au niveau des autres phénomènes associés, on note la présence d’un vent fort mais sans excès sous la plupart des orages ainsi qu’une une activité électrique peu importante, en tous cas, au niveau de la foudre nuage-sol, ce qui semble habituel dans les configurations atmosphériques où c’est surtout la dynamique qui prend les rênes vis-à-vis de l’instabilité, cette dernière n’ayant pas été très prononcée sur la région contrairement à la première. Enfin, on a observé une chute de température importante au passage des cellules faisant baisser le thermomètre de près de 10 degrés, soit de 23°C à 14°C d’après l’un des membres de notre collectif.
Vue d’ensemble du courant descendant d`une cellule orageuse.
Crédit photo : Jean-Yves Frique
Plus tard, à la suite de ces premiers orages, ce fut au tour d’une bande centrale du pays d’être concernée par des orages intenses. De nature multicellulaire, ceux-ci vinrent depuis la région parisienne pour toucher la botte du Hainaut vers 21h30. Durant leur approche, notre équipe de traqueurs d’orages présente sur place constata un net affaiblissement de la zone orageuse peu avant le passage de la frontière et pensa même qu’une dissipation de celle-ci s’enclenchait. Cette pensée fut vite balayée, une fois le système arrivé au sud de la ville de Charleroi car un net renforcement ou mieux encore, une « renaissance » s’est alors mise en place. Ce renforcement ayant eu lieu vers 22h00 s’est fait remarquer par une activité électrique incessante mais essentiellement intranuageuse, typique des orages entretenus par une forte dynamique atmosphérique et moins par l’instabilité.
Passage de la ligne de grain dans la région de Châtelet. La région est masquée
par les précipitations intenses tout comme le champ est malmené par le vent.
Crédit photo : Samina Verhoeven
Au passage de cette ligne orageuse dans la région de Châtelet, une zone orientale de Charleroi où se situait notre équipe de traqueurs, ce sont surtout de fortes précipitations qui furent observées, elles même accompagnées par un vent particulièrement soutenu. Quant à l’activité électrique, elle n’était pas sans rappeler celle qui a sévi durant le passage des orages du 26 mai 2009 avec la présence d’un véritable stroboscope dans le ciel belge. Dans le cas de ce mardi, on pouvait dénombrer deux à trois éclairs par seconde mais ceux-ci furent surtout de nature intranuageuse. Bien que brèves, les fortes précipitations causèrent des inondations dans la ville de Charleroi, celles-ci ayant été l’une des caractéristiques les plus notoires durant le passage de cette ligne orageuse comme nous pourrons le constater en détaillant la suite de la progression de ce système dans le pays.
Eclair internuageux surgissant à l’arrière du système orageux dans la région de Walhain-Saint-Paul.
Crédit photo : Samina Verhoeven
De fait, en progressant vers le nord-nord-est, la ligne orageuse se renforça en atteignant son potentiel maximal à l’est de la province du Brabant Wallon. Une pointe de 122 km/h fut enregistrée par la station météorologique de Beauvechain au passage de ladite ligne. A quelques kilomètres de Beauvechain, un phénomène venteux a causé des dégâts à Piétrebais. Des toitures ont été endommagées, du mobilier de jardin s’est envolé et des arbres ont été déracinés, certains tombant sur des habitations et des véhicules. En outre les dégâts sont compris dans un couloir restreint mais en l’absence d’une enquête de terrain, il n’est pas possible de déterminer quel phénomène est à l’origine de ces dommages (tornade ou rafale descendante).
Le bow echo sur le centre du pays à 23h15 (source : buienradar).
Des témoins ont également rapporté la présence de grêle dont les grêlons atteignaient parfois la taille d’une noisette soit 1,5 cm à 2 cm de diamètre. Ce sont ainsi les régions de Beauvechain, Incourt, Perwez et Jodoigne qui ont été les plus sévèrement touchées par les intempéries avec la présence d’arbres arrachés, de coulées de boues et d’inondations de la chaussée ainsi que de plusieurs habitations. Ce n’est finalement que vers la province du Brabant Flamand que la ligne orageuse commença à perdre en intensité pour finir par se dissiper aux Pays-Bas.
Inondation d’une chaussée après le passage de la ligne de grain à Gembloux.
Crédit photo : Michael Baillie.
Intervention rapide des pompiers dans la région de Gembloux suite
aux inondations et à la chute de quelques arbres.
Crédit photo : Michael Baillie
Enfin, si une question nous vient à l’esprit, c’est bien celle qui demande d’où provient cette subite montée en puissance de ces orages une fois arrivés sur l’Entre Sambre-et-Meuse. Pour réponse, celle-ci viendrait de la présence d’une subite divergence du courant jet en altitude s’étant concrétisé juste au niveau de la ligne orageuse. À la manière de ce qui se passe lorsque l’on éloigne rapidement deux plaques l’une de l’autre, un appel d’air s’est créé dû à une dépressurisation de l’air et c’est donc l’appel d’air créé vis-à-vis du sol qui a permis aux orages de profiter d’une subite aspiration au niveau de leur courant ascendant, le moteur de ces phénomènes atmosphériques. La présence de nombreux éclairs dans le système a justement trahi les fortes turbulences de l’air qui devaient régner au sein de celui-ci.