Le 26 janvier 1682 a vu l’une des pires tempêtes que la Belgique ait connue, d’après les historiens. Les dommages engendrés sont colossaux.
« Dans l’après-diner de ce jour mémorable, les eaux de la mer, tourmentées par un vent de Nord-Ouest, rompirent la plupart de nos digues, et firent irruption, presque à la même heure, par Nieuport, Ostende, l’Ecluse, le Sas de Gand, Doel, Calloo, Kruybeke, Rupelmonde, Basel, Hoboken, Kieldrecht, Lillo, Willebrouck, etc, etc. Ce malheur fut consommé si promptement à Ostende que les deux tiers de la ville étaient inondés avant que personne n’eût eu l’occasion de fuir. Ceux qui ne s’empressèrent pas de chercher leur salut aux plus hauts étages des maisons furent noyés dans les rues et dans les chambres. Les eaux conservèrent une hauteur extraordinaire jusqu’au milieu de la nuit. Ce ne fut que le lendemain qu’on put secourir les habitants consternés en les emmenant hors de la ville au moyen de chevaux, de chariots et de nacelles. Ostende seul éprouva des pertes pour 550.000 florins, sans compter les dommages causés aux fortifications. »
Illustration réalisée à posteriori (1702) des inondations de 1682 et 1686, par J. Luyken.
« Anvers et ses environs furent encore plus cruellement frappés. Tout le pays situé entre cette ville et Hulst offrait l’aspect d’une mer turbulente sur laquelle flottaient en grand nombre des cadavres d’hommes et d’animaux. Ça et là on apercevait des toits et des troncs qui avaient résisté à la violence des flots et qui menaçaient de s’écrouler dans l’abîme sous le poids des malheureux qu’ils portaient. Mais il n’était guère possible de les secourir à cause du vent et de l’obscurité qui effrayaient les marins les plus hardis. Des milliers de personnes périrent ainsi de froid, de faim et de peur pendant cette nuit affreuse. »
« À l’exeption des polders de Verrebrouck et de Beveren, tous les polders de la Flandre et de l’ancien Brabant furent inondés. Anvers offrit un horrible spectacle. L’eau ayant envahi toutes les caves et abîmé des marchandises pour des millions de florins, s’éleva à une hauteur telle que les vaisseaux vinrent heurter contre les maisons qui bordent les quais. Elle ruina une foule d’habitations et se jeta dans les églises avec tant de force que les autels s’écroulaient sur le pavement. Dans la cathédrale Notre-Dame, les flots ouvrirent plusieurs tombes et en arrachèrent des cercueils et des cadavres. La tête de Flandre fut presque détruite de fond en comble. On eut beaucoup de peine, quelques jours après cette catastrophe, à retrouver les traces du cimetière et des maisons qui l’entouraient. Inutile de dire qu’il ne resta rien des fortifications »
« Il serait trop long de nommer toutes les localités qui souffrirent plus ou moins de ce bouleversement de la nature. Les contemporains eux-mêmes n’ont pas d’ailleurs pris ce soin. Mais le nombre de morts fut incalculable. En Hollande, où l’inondation fut plus considérable encore, on estime qu’il périt environ 60.000 personnes. Nous ne croirions pas exagérer en portant au tiers de ce chiffre les pertes de la population belge. »
« À Anvers, l’incendie vint ajouter encore aux horreurs de l’inondation. L’incendie qui se communique rapidement aux maisons voisines consuma plusieurs habitations. Le reflet des flammes dans cette mer couverte de personnes mourantes et de toutes sortes de débris dut offrir l’un des plus effrayants spectacles que l’imagination puisse former. »
La peinture ci-dessus, réalisée par Ludolf Bakhuizen en 1682, pourrait bien représenter la tempête en question.
« Les ravages de l’eau ne se bornèrent pas aux contrées maritimes de la Belgique. Une inondation fluviale causée par des pluies continuelles, affligea presqu’en même temps les autres provinces qui eurent aussi de grands malheurs à déplorer. La Senne et la Dyle débordèrent sur toute la longueur de leur cours et ravagèrent les villes et les campagnes de toute la région de Bruxelles, Louvain, Wavre et Malines. Plusieurs auteurs rapportent que cet évènement coûta la vie à 6.000 Brabançons. »
Auteur des extraits de journaux : Ainé Coolmans (Revue de Bruxelles mai 1838).