Aller au contenu

09/05/1820 – Tornade en province d’Anvers

    Le mardi 9 mai 1820, le passage d’une forte tornade est signalé vers 4h00 de l’après-midi (heure d’époque) sur les villes de Boom et de Kontich en province d’Anvers, ainsi que dans les environs de Zoersel, soit sur une trajectoire de 32 km. Toutefois, un couloir de dommages est constaté sur 50 km de longueur jusqu’à Turnhout, sans pouvoir cependant attester qu’il s’agisse du même phénomène, par manque d’informations. Les dégâts, caractéristiques à l’occurrence d’un tourbillon, sont importants et plusieurs victimes sont à déplorer. La tornade a pu atteindre une intensité F3 selon les descriptions.

    Le Journal de la Belgique : pièces officielles des armées, décrit l’évènement dans un article intégré dans l’édition du 12 mai 1820 :

    « Contich, 10 mai. Une horrible calamité vient de porter la désolation dans notre commune. Hier, vers les quatre heures de relevée un orage épouvantable qui obscurcissait presqu’entièrement  l’horizon, nous fit pressentir des suites fâcheuses ; la pluie tombait par torrents, la foudre grondait d’une manière effrayante. Un moment après l’orage, survint une bourrasque qui s’avançait contre l’orage et qui écrasa plusieurs bâtiments ; plus de soixante-dix maisons sont plus ou moins endommagées ; de gros arbres ont été déracinés et brisés ; on ne connait encore qu’un homme qui ait été mortellement blessé ; d’autres ont été enlevés par le vent ; quelques bestiaux ont péri.
    La diligence n’était qu’à 30 ou 40 pas du relais ; le conducteur voyant l’approche de l’ouragan, s’empressa de dételer les chevaux de devant : au même instant les chevaux furent renversés et la diligence rétrograda, et fut entrainée à quelque distance en arrière ; grâces au sang froid et à la présence d’esprit du conducteur qui a fait preuve d’un grand courage, les voyageurs n’ont éprouvé aucun accident. Les chevaux qui heureusement n’étaient point attachés dans la grange prirent la fuite avant que cette grange ne fût écrasée. Notre église est fortement endommagée. Mr. Le gouverneur de notre province, est arrivé ici ce matin. On assure qu’à Zoersel sept maisons on été détruites et quatre à Westmael. On nous annonce également qu’à Boom l’ouragan a produit de grands ravages, ainsi qu’à Turnhout et dans deux villages voisins.
     »

    « Bruxelles, 11 mai. Des voyageurs, venant des lieux ravagés par l’orage dont il est question ci-dessus, racontent qu’à Boom, outre plusieurs maisons renversées, quelques personnes auraient perdu la vie. D’aussi cruels effets d’un ouragan nous semblent ne pouvoir être attribués qu’au passage d’une trombe. »

    Illustration de la tornade du 9 mai 1820 en province d'Anvers. Crédit : Frédéric GodefroidIllustration de la tornade du 9 mai 1820 en province d’Anvers. Crédit : Frédéric Godefroid©Belgorage

    Egalement dans l’édition du 14 mai 1820, nous trouvons ces informations complémentaires :

    « Anvers, 12 mai. L’ouragan qui a fait tant de ravages à Contich le 9 de ce mois, a détruit également plus de la moitié du bourg de Boom : les deux rues qui longent le Rupel n’offrent qu’un amas de ruines ; les boutiques qui se trouvaient dans ces rues sont écrasées et aplaties ; toutes les marchandises, non point avariées, mais déchirées et détruites. Les mâts de deux navires qui étaient en radoub ont été brisés, les cordages arrachés et emportés à une grande distance. Une maison se trouvait sur une espèce de digue, le vent en enfonça la porte et fit passer au travers des vitres un enfant qui était en face de la croisée. Une planche longue de quinze pieds fut enlevée du quai par-dessus les maisons et lancée très loin. Deux arbres situés au lieu de l’embarquement furent rompus et emportés. L’ouragan n’avait point de direction fixe, et dans la route oblique qu’il a parcourue, il a tout détruit. Roysbroek, Rumpst, Reeth, Waerloos, Vremde, et d’autres villages ont éprouvés plus ou moins de dégâts.
    On assure que M. notre gouverneur a parcouru avant-hier toute la ligne sur laquelle l’ouragan a exercé ses ravages. 
    »

    Aussi dans l’édition du 15 mai 1820, quelques précisions sont encore apportées :

    « Anvers, 13 mai. Aux détails que nous avons déjà donnés sur les malheurs produits par l’ouragan du 9 de ce mois, nous ajouterons deux autres circonstances qu’on vient de nous faire connaître. A Zoersel, la grange de M. Treau a été enlevée au-dessus d’un tas de fagots à trente pas de distance. Dans la forêt du même lieu, plus de cinq cents pieds d’arbres ont été détruits d’une manière presque incompréhensible. »

    Et enfin dans l’édition du 16 mai 1820 :

    « Mr. Le gouverneur de la province vient d’adresser une circulaire aux bourgmestres des communes ainsi qu’aux curés et desservants des paroisses pour les inviter à appeler la solicitude des citoyens sur les victimes des désastres (…) ; enfin l’orage accompagné d’un ouragan impétueux qui, le 9 de ce mois a ravagé les commune de Boom, Reeth, Contich, Bouchout, Vremde, Rans et Zoersel, etc. »

    Le contexte atmosphérique dans lequel  ces orages se sont formés est difficile à appréhender à cause du manque de données. Néanmoins, nous disposons de quelques informations qui permettent de formuler des hypothèses.

    Les températures relevées dans la période pour Paris et Bruxelles montrent qu’au départ, on se trouve dans un contexte assez froid pour évoluer ensuite dans une période plutôt douce avec une certaine constance dans les températures :

    05/05/1820 : 15°C (FR)  12°C (BE)
    06/05/1820 : 15°C (FR)  11°C (BE)
    07/05/1820 : 17°C (FR)  13°C (BE)
    08/05/1820 : 21°C (FR)  18°C (BE)
    09/05/1820 : 22°C (FR)  19°C (BE)
    10/05/1820 : 21°C (FR)  20°C (BE)
    11/05/1820 : 24°C (FR)  22°C (BE)

    Il n’y a manifestement pas de passage d’un front froid mettant fin à une période chaude, donc probablement pas non plus de convergence pré-frontale classique. Les seules données de vents qui existent à l’époque proviennent des Pays-Bas, où les régions côtières sont soumises, en date du 9 mai, à une brise de mer de Nord et des températures inférieures à 15°C voire même à 10°C en soirée.

    Cette configuration peut faire penser à un régime continental à l’intérieur des terres, avec des vents de nord-est ou d’est en surface, et peut être de sud-est ou de sud à moyenne altitude au vu de l’advection d’air relativement doux pour un début du mois de mai. Ce qui amènerait un cisaillement très important. Mais, nous restons purement dans le domaine de la spéculation.