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21/09/1893 – Tornades

    Le mois de septembre 1893 est pluvieux et nébuleux, la température est légèrement inférieure aux normales et, au niveau orageux, il n’y a rien de très particulier à signaler, les orages étant peu intenses en général.

    Le 21 septembre, la tendance fraîche se poursuit, avec des maximas ne dépassant guère une quinzaine de degrés et un flux maritime commandé par des basses pressions sur le nord de la Mer du Nord et des hautes pressions sur le sud de la France et la Suisse. Cependant, une dépression secondaire se creuse sur la Bretagne et son parcours très méridional va faire basculer les vents des basses couches temporairement vers le sud-est, induisant des cisaillements plus marqués.

    Il n’est donc pas étonnant qu’une dégradation plus virulente marque le temps en Belgique en ce 21 septembre 1893. En effet, en France, un orage cause localement de nombreux dégâts, pouvant même être attribués en certains endroits à l’action de tornades, plus particulièrement près de la capitale française, Paris, où une tornade F3 cause de lourds dégâts.

    Albert Lancaster : « Le jeudi 21 septembre 1893, vers 11h00, un violent orage s’abattait sur Paris. Sur une longueur de plus d’un kilomètre et sur une largeur de 50 mètres environ, tout fut balayé sur le passage de la bourrasque. Les toits des maisons furent enlevées et les jardins saccagés. L’usine de borax fut dévastée, une maison dans la cour entièrement détruite, les constructions effondrées, les murs abattus. En passant la Seine, la trombe produisit un remous extraordinaire de l’eau du fleuve, qui s’est trouvé un instant presque vidé sur place.

    Habitation détruite par une tornade en région parisienne, le 21 septembre 1893. Source ; M.G. RaymondHabitation frappée par la tornade française. © M. G. Raymond

    En Belgique, l’orage a produit possiblement trois tornades. Une dans la région de Chimay et deux autres au sud de Ciney.

    Albert Lancaster : « Poursuivant sa marche, l’orage atteint la frontière de notre pays vers 2h00 de l’après-midi. À Couvin, où on l’observa d’abord, il fut accompagné d’un vent violent. Vers 3h00, il atteint Ciney. Dans le voisinage de cette localité, il occasionna de grands dégâts. »

    « Les cantons de Herve et de Flénu ont été éprouvés également par cet orage. D’innombrables branches jonchaient le sol ; plusieurs arbres ont été décapités et même déracinés. À Hageneux (région de Chimay), un toit en chaume a été arraché de ses attaches et porté au loin. Les dégâts occasionnés par le vent rappellent ceux que provoquent les trombes et le peu de largeur des espaces sur lesquels ils ont été constatés donne d’autant plus lieu de penser que l’orage état réellement accompagné d’un météore de ce genre. »

    M. D. Tillieux : « On observe, à Custinne, un orage se dirigeant vers le nord-est. Il passe au-dessus du village de Erhet où il renverse une maisonnette, puis au-dessus du village de Ronvaux où on ne signale aucun dégât pour arriver au-dessus d’Ychippe vers 3h30 du soir. L’Eglise est la première atteinte. Les ardoises sont enlevées sur une surface assez grande, mais irrégulière. Un pommier qui se trouve vers le nord-est, à 150 mètres de l’église, est décorcé. Un peu en dessous, plusieurs pommiers sont déracinés. Plus loin, au nord, un peuplier est aussi décorcé ; quatre autres, voisins, ont le sommet arraché. À 40 mètres à droite de l’église, se trouve un pâté de constructions. D’abord, le long du chemin, quelques maisonnettes ont assez souffert dans leur toiture en chaume. Derrière, un corps de ferme a peu ou pas souffert. La grange en face a eu sa toiture en ardoise complètement enlevée. Un petit fournil en pierre couvert de tuiles, adossé à une autre grange, a été littéralement détruit. Cette grange, construite en brique et récemment couverte en ardoise a eu son toit enlevé et détruit. Un espace de 2 mètres existe entre cette grange et la propriété Gustin, maréchal ferrant. Une petite construction en briques a été détruite également. Au moment de l’orage, un conducteur nommé Lecomte se trouvait dehors à 1m50 de distance du bâtiment, en face de la porte ; dehors aussi était le fils Gustin, à 2 mètres de Lecomte. Celui-ci est atteint et tué net. À l’instant, le fils Gustin est renversé ; il veut se relever, mais il est projeté à une distance de 7 mètres. Il a le tendon du médius et la main droite coupé. La toiture en ardoises de tout le corps de bâtiments de la propriété Gustin est enlevée avec une fausse corniche en brique. L’angle de la forge est lézardé des deux côtés. Les toitures en chaume des bâtiments voisins, en dessous, sont enlevées également. Le chemin est obstrué par les débris. C’est un spectacle lamentable. Dans sa course, l’orage a enlevé deux toitures en chaume à Chapois et a causé de très importants dégâts dans les bois de Jannée (Pessoux) et dans ceux de Barvaux-Condroz et de Méan.»

    Cette description ne laisse que peu de doutes sur la nature du phénomène. La tornade aurait ainsi débuté vers Herhet avant de se rétracter et de se reformer durablement à partir de Ronvaux jusqu’ aux environs de Méan, soit sur une distance d’environ 20 kilomètres et avec une trajectoire s’incurvant progressivement vers la droite.

    A. Lancaster :

    « Plus au NE, à Clavier, la tourmente s’est déclarée à 3h40 et l’orage fut accompagné d’une chute de grêlons de la grosseur d’une noix. Beaucoup de vitres furent brisées et un grand nombre d‘arbres dépouillés. »