Entre la soirée du lundi 22 août et la mi-journée du mardi 23 août 2011, ce ne sont pas moins de cinq vagues orageuses qui se sont présentées sur le territoire belge. Ces orages bien structurés arrosèrent copieusement certaines régions en apportant même de la grêle par endroits. Les coups de vent ne furent pas rares non plus sans oublier une activité électrique qui fut telle que l’IRM ne comptabilisa pas moins de 12 000 impacts de foudre et décrit cet épisode comme « l’un des plus intenses du 21ème siècle d’un point de vue électrique ». Celui-ci, d’une durée remarquable, s’inscrit dans une période particulièrement orageuse qui court du 18 août au 10 septembre.
Coup de foudre positif dans la région de Rouveroy, en province de Hainaut, le 22 aôut 2011.
Crédit photo : Samina Verhoeven
Au niveau de la situation atmosphérique, la Belgique se retrouve dans le vaste secteur chaud d’une goutte froide remontant sur l’ouest de la France, avec un front chaud se mettant à onduler sur la mer du Nord après avoir traversé la Belgique en matinée et sur le temps de midi du 22. Toutefois, la présence de l’air chaud se remarque surtout en altitude, celui-ci étant décollé du sol par une mince pellicule d’air maritime où le vent souffle du nord-est. La journée du 22 août est pour ainsi dire assez hésitante, avec pas mal de nébulosité, de temps à autre une ondée et des maximales qui dépassent à peine les 20°C. Seul l’extrême sud-est du pays profite d’un temps estival. C’est dans cet ensemble marqué par de puissants cisaillements que plusieurs convergences vont traverser le pays entre la soirée du 22 et le lendemain midi, chacune étant porteuse d’une vague orageuse.
Situation synoptique du 23 août 2011 à 2h00. Source : KNMI
Pour revenir brièvement à la genèse de ce qui représente l’une des plus longues offensives orageuses de ces derniers temps, tout a commencé par la remontée d’un premier système convectif de méso-échelle (MCS) en provenance de la France vers 17h30. Celui-ci ayant vu le jour en Bretagne comportait une activité orageuse soutenue chez nos voisins mais s’est progressivement affaibli en approchant nos frontières par déphasage progressif des différents éléments propices. Il ne possédait plus que quelques cellules actives en son sein lors de son entrée en Belgique. Ces dernières touchèrent la région de Mons et de Tournai sans montrer de sévérité particulière.
Vers 21h30, un second MCS également affaibli arriva vers nos frontières mais, contrairement au premier, celui-ci profita d’un phasage entre instabilité et dynamique et reprit soudainement de la force sur le département de l’Aisne en évoluant vers une formation orageuse dite en système convectif quasi linéaire (QLCS en anglais) Il s’en suivit une hausse des intensités pluviométriques, les plus forts échos se déplaçant de plus en crabe, amenant de très fortes précipitations à défiler sur un même couloir entre Aisne et Brabant wallon pendant plusieurs dizaines de minutes. Les premiers dégâts ne tardèrent pas à voir le jour dans certaines régions du Hainaut comme ce fut le cas à Charleroi et ses environs, mais aussi dans l’Aisne côté français où certains secteurs ont pu recevoir plus de 100 mm de pluie selon Kéraunos.
L’activité électrique ne fut pas en reste, avec un éclair toutes les quelques secondes, et marquée par une forte dominance intranuageuse. Les coups de foudre furent plus rares mais souvent puissants, provoquant des débuts d’incendie sur certains bâtiments. Plus à l’arrière des pluies intenses, les internuageux furent par contre nombreux et aisément observables, ceux-ci décrivant des structures complexes comme c’est régulièrement le cas à l’arrière des grands systèmes orageux.
Image radar des précipitations à 23h00, le 22 août 2011. Source : Meteo Services
En toute fin de soirée, le système s’orienta davantage à l’est-nord-est, cessant son déplacement en crabe, et balaya les provinces de Namur, de Liège et de Limbourg en début de nuit, en conservant une activité électrique soutenue. Le MCS évacua le pays vers l’Allemagne aux alentours de 2h00.
Éclairs internuageux typiques des structures MCS.
Crédit photo : Samina Verhoeven
Image satellite de 2h00 le 23 août. Le MCS de la soirée évacue progressivement la Belgique, mais
sur le nord de la France, la convection organise d’autres systèmes orageux
(source : Wokingham Weather).
Vers 03h30, un troisième MCS formé vers minuit sur l’est de la Normandie et ayant traversé le nord de la France entra sur le territoire belge via le Hainaut. Il fut globalement moins puissant que le précédent en concentrant son activité la plus intense dans un espace plus réduit, bien que l’activité électrique ait été à nouveau notable, avec un éclair toutes les quelques secondes. Les provinces du Hainaut, du Brabant Wallon et du Limbourg furent à nouveau touchées par ces intempéries. Il se désagrégea progressivement sur la Flandre après 5h00.
Peu après 6h00, un quatrième MCS lui aussi formé sur la Normandie en milieu de nuit vint frapper à nos portes en s’activant sensiblement au niveau de la province du Hainaut et du département du Nord où il toucha la région de Tournai assez longuement tandis qu’une autre section concernait l’ouest de la région de Mons peu après 7h00. Ce système progressa vers les provinces de la Flandre Orientale, d’Anvers, des Brabants Wallon et Flamand et du Limbourg tout en transitant par la région bruxelloise vers 8h00. A nouveau l’activité électrique fut intense.
Image radar des précipitations à 7h00 le 23 août 2011. Alors que le quatrième MCS touche le Hainaut
et l’ouest de la Flandre, un cinquième groupe de cellules se structure sur le nord de la France.
Source : Météo Service.
Coup de foudre accompagné d’éclairs internuageux.
Crédit photo : Samina Verhoeven
Au même moment, un cinquième et dernier MCS formé sur la Picardie à l’aube parvint à la frontière franco-belge peu après 8h00 et traversa les provinces du Hainaut, de la Flandre Orientale, des Brabants Wallon et Flamands, d’Anvers et du Limbourg en frappant de plein fouet la Capitale où de nombreuses inondations furent constatées. D’ailleurs, la chute de grêlons d’un diamètre de 1 cm fut observée par nos traqueurs d’orages. En outre, des grêlons de 2,5 cm aurait été signalés à Hasselt ainsi que dans la région de Charleroi. L’activité électrique ne fut pas en reste, du même acabit que celle des systèmes précédents.
Image satellite de 8h00 le 23 août 2011. On note le quatrième MCS sur la Flandre et le cinquième
sur la frontière belgo-française. Les sommets protubérants visibles indiquent une convection puissante.
A noter que le MCS de la soirée du 22 est toujours actif sur le nord-est de l’Allemagne.
Source : Wokingham Weather.
Coup de foudre descendant positif dans la région de Tournai.
Crédit photo : Samina Verhoeven
Il est à noter qu’outre les précipitations et les inondations, la très grande hauteur des cumulonimbus fut responsable d’un assombrissement exceptionnel du ciel, alors que le soleil était déjà levé depuis trois heures. La photo prise ci-dessous par un collaborateur de Belgorage en région bruxelloise montre le ciel noir signant l’arrivée du cinquième MCS sur le centre du pays.
Le ciel noir de nuit à l’avant du cinquième MCS en région bruxelloise
peu avant 10h00, le 23 août 2011.
Pour terminer, un système multicellulaire s’est constitué dans la botte du Hainaut peu après 11h00 pour ensuite remonter vers les provinces des Brabants Wallon et Flamand et du Limbourg en transitant par le nord de la province de Namur. Celui-ci fut globalement plus modéré que les MCS qui provoquèrent chacun de nombreux dégâts essentiellement dus aux inondations et aux coulées de boue :
- Orages et inondations, des dégâts impressionnants (Sudinfo)
- De violents orages ont frappés la Belgique (DH)
- Plan catastrophe à Hall (RTBF)
- Intempéries dans la région de Charleroi (RTBF)
- Inondations à Uccle (vidéo Youtube)
- Véhicules emportés par les eaux à Uccle (vidéo Youtube)
Un dossier sur ces orages a été établi et peut être consulté à l’adresse suivante : Les orages violents du 22 et 23 août 2011.