Durant l’après-midi et la soirée du mercredi 11 mai 2016, des orages se sont essentiellement développés vers la frontière franco-belge de la province du Hainaut. Si la plupart d’entre eux furent de nature mono voire multicellulaire, l’un de ces foyers a présenté des caractéristiques élaborées en évoluant même jusqu’au stade supercellulaire.
Nuage mur développé par une orage supercellulaire s’approchant de la région
d’Estinnes en province de Hainaut, le 11 mai 2016.
Pour en venir au contexte atmosphérique, la circulation de courants chauds d’origine subtropicale dans les basses couches et de courants froids en altitude liés à la proximité d’une goutte froide a permis une accentuation importante de l’instabilité. Mais cette forte instabilité de l’air n’était pas suffisante en elle-même pour autoriser à coup sûr la survenue d’orages. En effet, deux éléments importants risquaient de nuire au risque orageux. D’une part, le manque d’humidité dans les basses couches et d’autre part, la présence d’une inversion de températures. Ces éléments étaient d’ailleurs bien mis en évidence dans nos prévisions matinales.
Les premières cellules orageuses se sont développées aux environs de 14h00 sur les régions proches de Philippeville et de Couvin, toutes deux situées en province de Namur. Une fois formés, ces orages se sont déplacés lentement vers l’ouest-nord-ouest, ce qui était assez particulier par rapport à l’axe traditionnel sud-ouest – nord-est.
Occurrence des éclairs en Belgique durant la journée du 11 mai 2016.
Source : Lightningmaps
Cependant, la grande sécheresse de la masse d’air aura eu raison de ces premiers développements orageux, si bien que les cellules se sont partiellement dissipées peu de temps après. Malgré cela, l’humidité apportée par ces premiers foyers orageux aura permis à d’autres cumulonimbus d’éclore et de façon durable cette fois-ci. Ainsi, ces orages ont pu continuer d’évoluer tout en se décalant vers l’ouest-nord-ouest à la manière des tous premiers spécimens.
Radar de précipitations vers 17h30, le 11 mai 2016.
Source : KNMI Viewer
Parmi les cellules orageuses qui se sont développées dans le courant de l’après-midi et de la soirée, nous en retenons particulièrement une qui, durant près de cinq heures, aura fait parler d’elle en apportant des chutes de grêle, des précipitations abondantes ainsi qu’une activité électrique importante sur son passage. D’ailleurs, cet orage s’est déplacé sur une trajectoire atteignant 130 km soit depuis la région de Philippeville en province de Namur jusqu’à la région lilloise en France, ce qui est particulièrement long.
Orage supercellulaire sévissant sur la ville de Binche et observé depuis la région
d’Estinnes en province de Hainaut, le 11 mai 2016.
Radar de précipitations centré sur la région de Binche vers 17h30, le 11 mai 2016.
Source : KNMI Viewer
Durant les cinq heures de durée de vie de l’orage en question, celui-ci a connu des périodes d’intensification et d’affaiblissement, ce qui nous a tout d’abord fait penser à un possible orage monocellulaire à pulsation. Cependant, plusieurs traqueurs d’orages présents dans les régions de Walcourt, d’Estinnes ou encore de Leuze-en-Hainaut ont fait état de la présence d’un nuage mur bien développé sous le courant ascendant de l’orage observé. D’ailleurs, une vidéo réalisée par Michael Baillie, membre co-fondateur du collectif Belgorage, a permis de mettre en évidence une rotation bien marquée de la base du courant ascendant. En cliquant sur l’image ci-dessous, il vous est possible de visualiser l’ensemble du schéma.
Représentation schématisée de l’orage supercellaire sur base
du radar de précipitations vers la région de Binche à 17h25.
Source : KNMI Viewer – Crédit illustration : Jean-Yves Frique
En outre, les clichés pris par Keegan O’Neill, Michael Baillie, Jean-Yves Frique, Christiane Schallon (toutes et tous membres de Belgorage) ainsi que par Jeroen Vanheers et Elisah Vanhee mettent bien en évidence la présence d’un nuage mur bien structuré. De ce fait, cette cellule peut parfaitement être considérée comme un orage supercellulaire.
Orage supercellulaire observé depuis la région de Chapelle-à-Wattines
en province de Hainaut, le 11 mai 2016.
Radar de précipitations centré sur la région de Tournai vers 19h30.
Source : KNMI Viewer
Comme dit un peu plus haut, l’orage supercellulaire a provoqué pas mal de phénomènes associés pour le moins intenses, surtout au niveau des précipitations qui créèrent des inondations notamment à Walcourt, Ham-sur-Heure, Thuin, Binche, Gaurain-Ramecroix et Tournai. De plus, des grêlons d’une taille de 2 cm furent relevés dans certaines régions dont Walcourt et Berzée, des localités situées non loin de Thuin.
Fortes précipitations issues d’un orage supercellulaire transitant par la région
d’Estinnes en province de Hainaut, le 11 mai 2016.
Occurrence des éclairs en province de Hainaut durant la journée du 11 mai 2016.
Source : Lightningmaps
Enfin, en dehors de cet orage pour le moins marquant, d’autres cellules ont sévi le long de la frontière franco-belge, toujours au niveau de la province du Hainaut. De nature généralement mono ou multicellulaire, ces orages apportèrent généralement beaucoup de précipitations sans pour autant provoquer de problèmes aussi importants que ceux infligés par l’orage supercellulaire.
Plusieurs articles furent réalisés par la presse écrite sur les conséquences des orages, notamment au niveau de celles provenant de la supercellule. Parmi ces réalisations médiatiques, nous en avons fait une sélection que nous vous proposons de suite :
Éclair internuageux se manifestant au sein d’un orage monocellulaire vers la région
de Thuin en province de Hainaut, le 11 mai 2016.
De cette offensive, nous retenons surtout le côté surprenant constitué par la seule présence d’un orage supercellulaire pour le moins élaboré alors que la dynamique d’altitude n’était pas très importante. Ainsi, l’instabilité et les cisaillements directionnels ont quasiment suffi à eux seuls à mettre en place l’un des orages qui aura marqué les esprits durant cette année 2016.