Après un hiver où les conditions anticycloniques ont dominé, le retour des dépressions atlantiques se fait brutalement. En effet, sur cette première quinzaine du mois de mars 2019, les coups de vent, tempêtes et orages se succèdent sur nos régions. D’ailleurs, une tornade se développe même dans l’extrême est de la Belgique. Dès lors, de nombreux dégâts sont observés à travers le pays à la suite de ces événements qui sont développés dans cet article.
Dès la seconde partie du mois de février 2019, l’anticyclone placé sur l’Europe ne fait que maintenir à distance de puissantes dépressions atlantiques. Toutefois, en Belgique, le mois de février est calme et très doux dans sa seconde partie (avec de nouveaux records de chaleur, dont le record belge mensuel établi le 27 février, avec 22,4°C à Angleur, situé en province de Liège). À l’inverse, le mois de mars 2019 voit le retour d’un puissant flux d’ouest sur nos régions, drainant une multitude de perturbations et de dépressions creuses vers l’Europe occidentale.
Le 20 février 2019, une dépression sous 940 hPa étend sa spirale sur l’océan, donnant des rafales estimées bien
au-delà de 160 km/h (vent moyen de 12 Beaufort) et des creux de 13 mètres en moyenne. Source : Infoclimat
Le 2 mars 2019, c’est une nouvelle dépression de tempête très esthétique qui gravite sur l’océan, mais cette fois bien plus près de l’Irlande. Dans son sillage, une onde dépressionnaire (visible dans le coin inférieur gauche de l’image ci-dessous) a pris la direction de l’Europe. Cette tempête naissante, nommée Freya, est le premier épisode venteux à nous concerner en date du lendemain (3 mars 2019) et la nuit suivante.
Image satellite du 2 mars 2019, avec une nouvelle dépression de tempête à l’ouest de l’Irlande.
Source : Wokingham Weather
3 – 4 mars 2019
En fin d’après-midi du 3 mars 2019, Freya, cette fois bien creusée, atteint le sud-ouest du Royaume-Uni en donnant des rafales jusqu’à 120 km/h au Pays-de-Galles. Bien qu’à l’écart du centre dépressionnaire, la Belgique est concernée par le passage d’une limite secondaire en fin de nuit du 3 au 4 mars 2019. Cette dernière prend un caractère instable en transportant des lignes de grains parfois très venteuses. Quelques orages isolés se forment, mais les cellules ne perdurent pas dans le temps. Les plus fortes rafales mesurées par les stations officielles sont de :
- 105 km/h à Zeebrugge (province de Flandre Occidentale)
- 97 km/h à Gosselies (province de Hainaut) et à Uccle (Bruxelles)
- 90 km/h à Humain (province de Luxembourg)
Sillage turbulent à l’arrière d’une ligne de grain transitant par la région de Les Tailles
en province de Luxembourg, le 4 mars 2019 à 7h30.
Quelques dégâts sont relevés sur la végétation, mais sans gravité, avec tout au plus des arbres déracinés.
La carte d’analyse de surface à 7h00 montre le centre dépressionnaire de Freya en mer du Nord. Le front froid est à cette heure-là déjà sur l’Allemagne, tandis que la limite secondaire est représentée sous la forme d’un front occlus et se trouve alors à la frontière belgo-allemande. Cette limite circule sous un maximum de Jet-stream et dans une masse d’air légèrement instable en raison de la présence d’un creux d’altitude rempli d’air très froid (moins de -30°C à 5 km d’altitude).
Analyse de surface à 7h00, le 4 mars 2019.
Source : KNMI
La tempête Freya en matinée du 4 mars 2019.
Source : Wokingham Weather
Nous vous invitons à suivre deux liens pour obtenir davantage d’information sur la tempête Freya du 3 et 4 mars :
7 mars 2019
Les jours suivants, notre météo reste agitée. Le jeudi 7 mars 2019, une nouvelle dépression sous 980 hPa circule en mer du Nord, à nouveau accompagnée d’air froid en altitude. Cette journée voit en conséquence de nombreuses averses parfois orageuses se développer dans un ciel de traine. Toutefois, les orages présentent une faible activité mais s’accompagnent localement de chutes de grésil. L’excellente visibilité dans cette masse d’air maritime polaire permet d’observer aisément les nombreux cumulonimbus générant ces averses.
Coups de foudre détectés durant la journée du 7 mars 2019. Source : Lightningmaps
Averse orageuse vue depuis la tour de contrôle de Steenokkerzeel, en province de Brabant Flamand, le 7 mars 2019.
Arc-en-ciel formé sous une averse à Bellecourt, en province de Hainaut, le 7 mars 2019 vers 15h30.
Mammatus observés sous un orage dans la région de Bande, en province de Luxembourg, le 7 mars 2019 vers 18h30.
Crédit photo : Benjamin Gilson
10 – 11 mars 2019
Le 10 mars 2019, c’est la dépression Eberhard qui se creuse en passant en mer du Nord puis sur les Pays-Bas. Malgré sa pression centrale peu basse (995 hPa), elle engendre un resserrement isobarique relativement important, ce qui génère un épisode de vents violents sur le nord de la France, la Belgique, le sud des Pays-Bas et l’ouest de l’Allemagne. Ce resserrement est du à l’extension d’une crête de l’anticyclone des Açores vers le Golfe de Gascogne. Chez nous, les vents les plus forts sont observés dans la traîne entre la fin de la matinée et le milieu de l’après-midi, avec des rafales maximales comprises généralement entre 90 et 120 km/h. On relève ainsi :
- 122 km/h à Stabroek (province d’Anvers)
- 119 km/h à Zeebruges (province de Flandre Occidentale)
- 112 km/h à Middelkerke, Beitem (province de Flandre Occidentale), Zaventem (province du Brabant Flamand) et Bierset (province de Liège)
- 108 km/h à Melle (province de Flandre Orientale)
- 104 km/h à Deurne (province d’Anvers)
- 101 km/h à Saint-Hubert , Humain (province de Luxembourg), Gosselies (province de Hainaut), Uccle (Bruxelles) et Sint-Katelijne-Waver (province d’Anvers)
Le centre de la tempête Eberhard gagne le centre des Pays-Bas peu avant midi, le 10 mars 2019.
Source : Wokingham Weather
Cela faisait de nombreuses années que des vents de tempête généralisés à tout le pays n’avaient pas été observés (seule la Gaume a été épargnée). À Zaventem, il faut remonter à 2002 pour trouver des mesures de vent équivalentes, les vents observés lors de la tempête Kyrill (en 2007) y ayant été moins forts. Autant dire que des dégâts sont nombreux, on ne compte plus les arbres arrachés, les toitures envolées, les routes bloquées et les poteaux électriques renversés. Malheureusement, on déplore un mort et deux blessés en Belgique, et d’autres victimes sont également recensées dans les pays limitrophes..
La tempête Eberhard à Middelkerke, le 10 mars 2019. Crédit photo : Patrick Gerard
Toiture envolée à Mortsel, en province d’Anvers, le 10 mars 2019. Crédit photo : Albert Gheuens
Toujours dans la traîne d’Eberhard, quelques orages s »organisent durant l’après-midi, les cumulonimbus générateurs laissant parfois entrevoir des mammatus sous leurs enclumes. En cours de soirée et pendant la nuit du 10 au 11 mars 2019, de nouvelles cellules orageuses se forment sur le centre du pays. Ces orages sont accompagnés de puissants coups de foudre positifs, réveillant bon nombre d’habitants, ainsi que de chutes de grésil, de grêle (1 cm) et de neige.
En effet, les cellules se déplaçant d’ouest en est, les précipitations prennent un caractère hivernal sur l’est du pays et laissent quelques centimètres de neige sur le relief.
Arcus devançant une cellule orageuse sévissant dans la région de Ninove en province de Flandre Orientale, le 10 mars 2019 vers 19h00
et observée depuis la région d’Ottignies en province de Brabant Wallon.
Les orages de neige ont laissés une couche de plusieurs centimètres à Botrange, en province de Liège, le 11 mars 2019 au
lever du jour. Crédit photo : Alexis Papapanayotou
Paysage enneigé à Marvie, en province de Luxembourg, le matin du 11 mars 2019. Crédit photo : Nathalie Gillieaux
Coups de foudre détectés durant la journée du 10 mars 2019 ainsi que durant la nuit du 10 au 11 mars 2019.
Source : Lightningmaps
La journée du 11 mars 2019, la Belgique se trouve toujours dans un contexte bien venteux. Dans un ciel de traîne, des averses se forment et présentent de belles structures, à l’image de la journée du 7 mars 2019, et s’accompagnent localement de giboulées.
Averse touchant la région d’Alost, en province de Flandre Orientale, le 11 mars 2019. Crédit photo : Jurgen Tolleneer
Nous vous invitons à consulter les trois liens suivants pour obtenir davantage d’informations sur les dégâts de la tempête Eberhard du 10 mars 2019 :
- La tempête fait de nombreux dégâts en Belgique (RTLInfo)
- La tempête a causé beaucoup de dégâts (Le Soir)
- La tempête fait rage dans tout le pays (Het Nieuwsblad) (en néerlandais)
13 mars 2019
Le mercredi 13 mars 2019, c’est le tour de la dépression Franz. Celle-ci se creuse sur la Mer du Nord depuis l’Ecosse pour toucher le Danemark avec une pression de 975 hPa. Les vents les plus forts concernent les Pays-Bas ainsi que le nord de l’Allemagne, avec des rafales autour des 100 km/h. En Belgique, des rafales de vent se font également sentir, comprises généralement entre 70 et 80 km/h.
Mais cette fois-ci, le vent fait parler de lui sous une autre forme. En effet, une tornade touche le village de Roetgen, à cheval sur la frontière belgo-allemande, à l’extrême est de la province de Liège.
Cette journée est marquée par des orages assez forts pour la saison, ceux-ci bénéficiant d’un apport de dynamique grâce à une sortie gauche du jet-stream.
Chutes de grêle blanchissant le paysage à Saint-Nicolas, en province d’Anvers., le 13 mars 2019.
Crédit photo : Els Kaïret
Ainsi, dès la mi-journée, des cellules orageuses concernent essentiellement la moitié nord-est de la Belgique. Certains orages se montrent vigoureux et s’accompagnent d’une forte activité électrique ainsi que de chutes de grêle de taille significative (pour la saison). Trois cellules se démarquent des autres lors de cette journée.
La première prend naissance au-dessus d’Essen, village frontalier avec les Pays-Bas au nord de la province d’Anvers, aux alentour de 15h25. Elle s’accompagne d’une activité électrique assez impressionnante pour un début mars. L’orage se déplace vers le sud-est et traverse la province d’Anvers ainsi que la province de Limbourg. C’est dans cette dernière province qu’il perd en activité vers 16h30 dans la région de Léopoldburg.
La deuxième cellule se forme dans la région de Malines, en province d’Anvers, vers 14h30. Elle reste très faible en activité mais elle se renforce au nord de Tongres, en province de Limbourg, vers 15h35, en devenant orageuse. Ensuite l’orage continue sa route et produit alors, dans l’est de la province de Liège, une tornade peu avant 16h30 dans la région de Raeren. La tornade franchit rapidement la frontière allemande pour toucher le village de Roetgen où elle passe également en Belgique sur quelques dizaines de mètres. De nombreux dégâts sont reportés à son passage. Des recherches ayant eté menées ont conduit à la réalisation d’un article détaillé sur cet événement consultable sur notre site Internet.
Capture d’écran de la tornade de Roetgen, le 13 mars 2019. Crédit vidéo : Stormhunter 1703. Source : Youtube
La troisième cellule se développe sur Namur autour de 16h50 avant de s’activer au nord-est de Marche-en-Famenne, en province de Luxembourg, vers 17h20. La convection s’enclenche alors de manière assez explosive, si bien qu’aux alentours de 17h35, des grêlons de 2 à 3 cm sont observés à Dochamps. Des dommages sont reportés sur les carrosseries des véhicules. Ensuite, son activité augmente encore mais l’orage traverse des zones boisées. Il finit par faiblir vers 18h00, une fois arrivé au Grand-Duché de Luxembourg.
Grêlons de 2 à 3 centimètres de diamètres récolté à Dochamps, en province de Luxembourg, le 13 mars 2019.
Crédit photo : Luc. Source : RTLinfo
Les provinces les plus touchées par l’activité orageuse sont celles d’Anvers, du Limbourg, du Brabant Flamand, de Liège et en partie celle du Luxembourg. Parmi ces cellules, il est possible que l’une ou l’autre aient évolué en supercellule LT.
Coups de foudre détectés durant la journée du 13 mars 2019. Source : Lightningmaps
Coup de foudre dans la région de Sprimont, en province de Liège, durant la soirée du 13 mars 2019.
Nous vous invitons à suivre ces quelques liens pour obtenir davantage d’informations sur les événements du 13 mars 2019 :
- Une tornade s’abat sur l’Eiffel (Vers l’Avenir)
- Une tornade aux portes de la Belgique (RTLInfo)
- Des chutes de grêle provoquent des dégâts (RTLInfo)
Les jours suivants, le défilé des perturbations continue, dans un contexte toujours venteux. Cependant, plus aucun phénomène orageux ne se distingue.
Ceci clôt la première période orageuse de l’année 2019, qui est marquée par de nombreux phénomènes (vent, grêle, tornade) ainsi que par des structures nuageuses d’exceptions.