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Rétrospective du voyage à la Tornado Alley 2024

Du 21 mai au 12 juin 2024, une équipe de Belgorage est retournée dans les grandes plaines de la Tornado Alley pour suivre les orages américains. 5 ans après le dernier voyage, nul besoin de préciser que l’impatience et les attentes étaient grandes au moment de s’envoler pour les Etats-Unis.

Et les trois membres de notre équipe, à savoir Samina Verhoeven, Michael Baillie et François Riguelle ne furent pas déçus. En effet, pendant les trois semaines du voyage, de nombreux orages ont pu être interceptés, et tous les phénomènes associés ont été observés. Pour cette rétrospective, nous vous invitons à découvrir les dates phares de ce voyage, qui fut d’un grand cru.

Commençons par le 23 mai. Il s’agit de la première journée de traque après notre arrivée sur le territoire américain. Nous sommes positionnés dans l’ouest de l’Oklahoma, où des orages costauds sont prévus par les modèles. Cependant, les débuts sont difficiles, car les cellules sont peu mobiles et elles s’effondrent lorsque nous les interceptons.

Après trois échecs successifs, on prend la direction de East Duke, où une dernière cellule reste active, avec une tornade imbriquée qui a sévi dans la région d’Eldorado peu avant. Cependant, la dangerosité de la situation nous fait abandonner cette cellule, car la rotation est complètement masquée dans les précipitations. Nous jetons alors notre dévolu sur un développement secondaire à l’arrière, notre dernière chance d’observer quelque chose.

Dès notre arrivée, l’orage se structure rapidement et est proche de poser une tornade devant nous. Mais il évolue trop rapidement et un nouveau mésocyclone prend le relais après une restructuration. Ainsi, la décision de se déplacer en ville pour y observer la grêle est prise. Rapidement, un rideau de grêle costaud se déverse et les premiers dommages sur notre véhicule sont engendrés par des grêlons de 4 centimètres de diamètre en moyenne, avec de nombreuses bosses sur la carrosserie et le pare-brise fêlé.

Ensuite, on essaye de suivre l’orage au déclin du jour mais on se retrouve bloqué par les dégâts de la précédente tornade, tandis que les routes secondaires en terre ou en gravier sont impraticables à cause des précipitations. D’ailleurs, de nombreux traqueurs sont embourbés. Ainsi, pas d’autre choix que d’attendre l’ouverture de la chaussée, à défaut de devoir faire un énorme détour. Cependant, après le passage libéré à la nuit tombée, nous nous retrouvons à nouveau rapidement coincés par d’importantes inondations à l’entrée de la ville d’Altus, mettant un terme à tout espoir de rattraper l’orage.

Bref, pour une première journée, c’était intense, et cela résume parfaitement la suite de notre séjour. En effet, il sera difficile de se positionner au mieux, mais lorsque cela arrivera, les phénomènes orageux se montreront au rendez-vous.

Ensuite nous arrivons au 25 mai. Durant cette journée, une imposante supercellule fut poursuivie ou plutôt, nous a poursuivi tout le long de la frontière Oklahoma/Kansas. Mais d’abord, un véritable casse-tête dans les modèles s’est produit, avec des revirements réguliers dans les timings et la localisation. Alors que nous sommes dans la région de Woodward, au nord-ouest de l’Oklahoma, une cellule se développe de manière explosive au nord. À notre arrivée sur place, un véritable monstre se développe en absorbant les nombreux autres développements orageux aux alentours. Toutefois, ces derniers lui mènent la vie dure, obligeant la cellule principale à réaliser de nombreuses restructurations, ce qui empêche l’orage d’exprimer son plein potentiel tornadique.

Néanmoins, il n’y a que dans ces contrées qu’un tel monstre puisse être observé. Avec son déplacement très rapide, c’est la course durant toute la traque, mais elle est parfaitement gérée. Il en résulte une chasse épique, durant laquelle de nombreuses équipes se font fait avoir à la première erreur. Cependant, la chance est aussi de notre côté, avec les rideaux de précipitations idéalement placés par rapport au réseau routier, qui lui-même suit la trajectoire de la cellule.

Près de la ville d’Anthony, nous passons un passage à niveau juste avant qu’il ne se ferme, piégeant la cohorte des chasseurs d’orages qui nous talonnent. Ensuite, après un bref arrêt sur un point de vue, nous devons reprendre de l’avance sur les précipitations malgré une forte rotation visible sous le nuage mur. D’ailleurs, une tornade engendre des dégâts quelques minutes après notre départ juste à l’endroit où nous nous trouvions. Finalement, en fin d’après-midi, les autres foyers orageux en perpétuel développement finirent par avoir le dernier mot en annihilant rapidement une énième tentative de restructuration de notre orage principal ; et l’ensemble se transforme en un amas informe et pluvieux.

Mais alors que tout espoir semblait terminé, de nouvelles cellules se forment à l’arrière du système, alors que nous sommes à présent à la frontière est des états mentionnés. Ces orages sont beaucoup moins massifs que notre monstre précédent, mais ils n’en sont pas moins violents. En effet, ces cellules sont isolées et bien électriques. Cependant elles sont d’assez courte durée de vie, et le temps de se positionner au mieux, elles perdent leur potentiel.

Toutefois, la dernière cellule garde son potentiel plus longtemps et on tente une interception près de South Coffeyville, alors qu’il est aux alentours de 3h00 du matin. Le problème c’est que nous sommes dans une région boisée, et le temps de trouver un point de vue, nous sommes pris de cours par le déplacement rapide de l’orage.

Ainsi, après avoir observé une structure bien dessinée avec un arcus RFD impressionnant, les fortes rafales de vent se présentent de suite. Malgré qu’un parking éclairé est trouvé de justesse, une panne d’électricité nous empêche de profiter au mieux du phénomène venteux, qui demeure impressionnant. Pour finir, on se dirige vers un motel à Independence, après cette journée particulièrement longue et riche en émotion, qui fait partie intégrante des dates marquantes de notre voyage.

Par après, on aborde le 28 mai. Le début de la journée est très difficile alors que nous sommes au Texas, à Waxahachie. En effet, nous sommes tirés du lit précipitamment aux premières lueurs du jour peu après 5h00 du matin, car une supercellule explose littéralement au-dessus de Dallas, en faisant beaucoup de dégâts. Mais la cellule évolue très rapidement en un système multicellulaire lorsque nous prenons la route. Nous tentons alors de devancer ce système en descendant au sud, mais son déplacement et son évolution extrêmement rapides rendent toute anticipation impossible, si bien que l’activité principale se déplace en direction de l’est, dans un revirement inattendu.

Nous essayons alors d’intercepter un segment secondaire vers Hillsboro, mais les éléments restent contenus et ont fini par nous rendre compte que nous aurions mieux fait de rester au motel, qui fut violemment balayé par un noyau dur. Ainsi, c’est avec une grande frustration qu’on récupère nos affaires abandonnées au motel à la lueur de nos téléphones, car l’électricité est coupée et les chambres inondées.

Heureusement, la suite de la journée nous est plus heureuse. Après un long déplacement vers l’ouest du Texas, nous interceptons une première supercellule LP à Tahoka, avant de voir celle-ci se dissiper en atteignant la ville. Ensuite, une autre supercellule est atteinte à proximité, présentant une structure bien plus imposante et durable que la précédente. Pour la première fois de la journée, nous pouvons enfin relâcher la pression et profiter du moment. Par après, nous devançons la cellule à plusieurs reprises grâce à son déplacement lent, ce qui nous laisse le temps de faire des images et de profiter de l’ambiance.

Enfin, nous décidons de nous laisser submerger par l’orage dans cette même ville de Tahoka, pour capturer des images des chutes de grêle. Et c’est une grande réussite, car le lent déplacement de l’orage nous permet de trouver un abri et de nous préparer à immortaliser le phénomène du début à la fin, le tout dans l’ambiance urbaine.

Ensuite, on rattrape la cellule qui se déplace vers l’est à allure réduite, pour finalement la voir se dissiper au coucher du soleil, ce qui donne malgré tout de belles ambiances. Ainsi, nous avons suivi cet orage durant toute sa durée de vie, et ce, pendant plusieurs heures en profitant un maximum, ce qui en fait une des traques les plus marquantes de notre séjour.

Enfin, depuis notre motel à Lubbock, on observe encore, en début de nuit, des orages électriques passer à proximité vers le sud, notamment à Tahoka, mais la fatigue est alors trop prononcée pour nous remotiver à sortir, comme la journée fut une nouvelle fois particulièrement longue.

Le 29 mai. Dès le lendemain, des orages sont entrevus au sud-est du Colorado. Nous nous positionnons près de la ville de Lamar, où une cellule prometteuse se développe. Une traque de rêve arrive ensuite, puisque durant près de 3 heures, nous restons sur notre point de vue, rejoints progressivement par de nombreuses autres équipes pendant que l’orage se régénère continuellement sur place, en produisant de magnifiques structures et un déluge de foudre.

À la tombée de la nuit, la cellule arrive enfin sur notre position, mais en s’affaiblissant. Cependant, alors que les autres chasseurs d’orages s’en vont, nous persévérons, car l’orage reste malgré tout actif.

Après un détour pour se remettre à nouveau sur sa trajectoire, la cellule se renforce et présente une magnifique structure de type LP, éclairée par l’activité électrique intense. De plus, au vu de son lent déplacement, nous profitons encore un moment du spectacle.

Par ailleurs, d’autres développements sont visibles autour de nous, nous ceinturant de toutes parts d’un déluge kéraunique. Finalement, notre orage perdant en activité, nous décidons de redescendre vers le Panhandle de l’Oklahoma pour trouver un motel à Boise City, car la nuit avance, tout en interceptant de nouvelles cellules. Ainsi, alors que la plus active d’entre elles s’apprête à traverser notre route, nous traversons les précipitations intenses pour arriver au moment où le courant ascendant s’approche. Et une fois encore, une très belle structure se dévoile.

Par après, à presque 3h du matin, la fatigue devient trop forte et nous optons raisonnablement pour arrêter la traque afin de dormir quelques heures.

Arrive le jour suivant, soit le 30 mai. Après une courte nuit, nous voilà encore sur une journée marquante. C’est même un cas d’école du déclenchement d’orages violents au Texas grâce aux forçages apportés par l’outflow d’un système multicellulaire. Ce dernier sévit depuis l’Oklahoma en matinée, avant de s’affaiblir. Mais l’outflow engendré par ce dernier se déplace rapidement, vers le sud-ouest. Et c’est d’abord la course pour rattraper l’axe de convergence des vents plus au sud, dans les environs de Midland. Rapidement, une cellule explose alors que nous sommes encore à une heure de route.

À notre arrivée en ville, nous sommes obligés de la traverser pour nous positionner correctement au sud de l’orage. Cependant, notre fenêtre avant que le noyau dur de l’orage n’arrive en ville est très courte. Nous essayons de traverser le centre urbain au plus vite sous la pluie, mais un tornado warning est émis au même instant. Un train se stoppe alors en plein milieu de l’agglomération, bloquant toute la circulation au niveau des passages à niveau. Et de plus, le seul tunnel passant en dessous des voies ferrées est inondé.

Dès lors, en mauvaise posture, coincés dans les embouteillages, nous sommes obligés de rapidement trouver une solution pour sortir de la ville. Enfin, c’est avec soulagement que nous arrivons sur un passage à niveau ouvert en périphérie de cette dernière. Cependant, beaucoup d’autres personnes ayant eu la même idée que nous, la circulation dense pose encore des problèmes, alors qu’une tornade est signalée au sol. Une fois libérés des ralentissements, on met tout en œuvre pour compenser notre retard qui ne cesse de s’accumuler. Malheureusement, le détour imposé par la présence du train dans la ville, nous fait rater une deuxième tornade, qui s’est formée juste en périphérie sud de l’agglomération urbaine.

Néanmoins, à notre arrivée, l’orage se mue pour présenter une incroyable structure typique des supercellules LP, ce qui nous fait vite oublier la frustration d’avoir raté une tornade. Après en avoir profité un moment, il finit par se dissiper complètement au coucher du soleil, en quelques minutes à peine.

Les jours se suivent et nous voilà au 31 mai. Après un arrêt touristique en attendant le déclenchement de la convection à Dimmitt, à la frontière nord du Texas avec le Nouveau-Mexique, après quelques heures d’attente, plusieurs cellules se développent rapidement à l’ouest, au Nouveau-Mexique, près de Clovis. Nous fonçons alors pour intercepter une cellule au développement explosif entre cette dernière localité et la ville d’Elida. Comme nous étions assez proches, on arrive rapidement sur place et nous nous retrouvons seuls face à cet orage, qui présente un nuage mur qui touche presque le sol.

À ce moment, alors qu’un tuba se forme devant notre position, un train passe à vitesse réduite, masquant totalement notre point de vue, le seul à proximité. Après une attente interminable, le dernier wagon passe au moment où un contact avec le sol est visible. Une tornade sévit alors à quelques centaines de mètres seulement de notre position, mais elle n’est malheureusement pas condensée et ne dure guère plus de 2 à 3 minutes.

Après sa dissipation, on veut retenter le coup plus loin, afin de réussir une interception proche. Cependant, malgré une très forte rotation s’exprimant au-dessus de notre point de vue suivant, rien ne touche le sol. Pourtant, les conditions semblaient idéales. Toutefois, pas de frustration dans l’équipe, car nous étions au cœur des évènements, aux premières loges de cette ambiance extraordinaire. Le reste ne dépendait pas de nos décisions.

Cependant, nous continuons la traque en fin de journée sur des cellules plus au sud, autour de la ville de Tatum. De belles ambiances sont encore observées au soleil couchant, avant que les orages ne s’activent davantage.

Ainsi, nous essayons d’intercepter l’orage le plus intéressant sur la ville de Plains, au Texas. Sur la route, de multiples coups de foudre s’abattent régulièrement. Mais, une fois en position pour observer le système arriver sur l’agglomération, il dévie et ralentit sa progression, tout en perdant son intense activité électrique. Nous nous voyons obligés d’aller à sa rencontre plus à l’ouest. Alors que d’autres développements orageux parasitent l’organisation de l’orage, nous nous arrêtons au bord de la route en compagnie d’une autre équipe. Un vent fort se lève instantanément, mêlé de poussière, nous empêchant presque de tenir debout. Cependant, l’ambiance qui s’en dégage est dantesque, car l’activité électrique intranuageuse devient aussi intense. Enfin, une fois le système en évacuation, nous partons pour prendre un motel à Denver City, à 1h du matin.

Le 1er juin, la fatigue s’accumule. Pourtant, pas le temps de se reposer, car la journée est une nouvelle fois prometteuse. De plus, la chaleur est accablante dans la région désertique du sud-ouest du Texas où nous nous rendons. Après un arrêt pour manger notre repas de midi à Alpine, les premiers orages se déclenchent dans les montagnes. Mais, comme le réseau routier est très pauvre, il n’est pas possible de directement aller à leur rencontre. Ainsi, on attend que la cellule la plus active nous atteigne. Après cette attente obligée et oppressante, l’orage se présente enfin devant nous, très massif, avec son nuage-mur typique des supercellules classiques. Depuis notre point de vue, nous restons au sec suffisamment longtemps pour observer l’abaissement nuageux translater proche devant nous, alors que les précipitations tombent dans notre dos. À ce moment, une tornade touche le sol devant nos yeux à peu de distance, mais, encore une fois, non condensée et assez brève.

Il s’ensuit une course intense avec le RFD pour ne pas se laisser avaler par l’orage, sur une petite route sinueuse balayée violemment par les vents et la pluie. Pour une poignée de secondes, on repasse devant et on essaye de se repositionner au mieux. Sauf que la connexion internet fait défaut et que la prochaine route qui recoupe la trajectoire de l’orage est loin, beaucoup trop loin. En effet, on se rend compte après quelques dizaines de minutes que ce n’est pas jouable, car, visuellement, l’orage s’effondre. Dès lors, une grosse déception s’empare de l’équipe, car il nous semble que la mauvaise décision a été prise : nous aurions dû profiter des éléments pendant que nous en avions l’occasion, au lieu de trop anticiper. On décide alors de faire demi-tour et de tenter le tout pour le tout, en fonçant droit vers une cellule naissante qui semble visuellement se développer rapidement.

Néanmoins, son développement est explosif, à un tel point que nous ne l’avions encore jamais expérimenté. Toujours sans connexion internet, nous essayons une interception à vue. Cependant, alors que nous pensons réussir à devancer la cellule, le mésocyclone traverse la route quelques kilomètres à peine devant nous, rasant littéralement le sol. Par sécurité, sous un inflow très impressionnant, on se gare et nous décidons de capturer les éléments qui s’offriront à nous. Et nous n’avons pas été déçus.

En effet, nous subissons de très fortes rafales de vent dans l’inflow et des abaissements nuageux semblent toucher le sol sous le mésocyclone qui s’éloigne. Puis, des grêlons commencent à tomber, de plus en plus gros, pour finir par devenir de taille préoccupante. D’ailleurs, très vite, d’énormes chocs se font entendre sur la carrosserie alors que des vitres se brisent. Peu de temps après, le pare-brise est littéralement transpercé par des grêlons géants de 16 centimètres de diamètre qui pénètrent dans l’habitacle. Ils pilonnent également le sol, enlevant des mottes de terre entières aux bas-côtés de la route.

Alors que les éléments se calment après quelques minutes, nous n’osons pas sortir directement de la voiture, car de nombreux coups de foudre s’abattent à proximité. Après, on constate les impacts sur la carrosserie qui sont si gros que nous pouvons y mettre notre poing. Nous décidons alors de nous rendre à Marathon, la petite ville toute proche, afin de retrouver de la connexion internet et faire le point.

Sur le trajet, nous dépassons deux voitures garées, toutes vitres endommagées, alors qu’une ambulance arrive. On se dit que d’autres n’ont pas eu autant de chance que nous, car, à part quelques égratignures à cause des bris de verre, nous sommes indemnes. Par ailleurs, on remarque plusieurs vaches qui gisent au sol dans une propriété, sûrement tuées par la grêle.

Ensuite, en ville, on contacte l’assurance et on effectue un rafistolage des vitres pour nous permettre de rouler. À la suite de quoi, on traverse le désert inondé comme nous le pouvons pour atteindre la grande ville la plus proche, Fort Stockton. Une portion de route n’existe même plus, complètement emportée, et seul le shérif local nous indique le passage. Par ailleurs, heureusement que notre voiture est haute, sinon il aurait été impossible de franchir l’eau.

Enfin, nous arrivons à notre motel, et dès le lendemain, un garage nous attend pour changer de véhicule. Sans nul doute que cette journée restera gravée dans nos mémoires pour avoir vécu le phénomène le plus marquant de notre voyage.

Le 2 juin, on constate que les journées exceptionnelles ne s’arrêtent plus. Après avoir changé de voiture le matin et mangé un morceau à Midland, nous filons vers le nord où les paramètres sont très encourageants. À notre arrivée, on intercepte une première cellule LP à Plainview. En conséquence, nous la suivons quelques temps, mais celle-ci a du mal à évoluer malgré le potentiel. C’est alors que l’on remarque une autre cellule plus au nord, dont le développement se renforce continuellement. À ce moment, on décide de foncer vers cet orage qui se structure de plus en plus sur les radars, nous faisant craindre la survenue d’une tornade dans les prochaines minutes. Sur la route, on observe déjà une structure magnifique avec un mésocyclone parfaitement dessiné et en retrait des précipitations.

Par la suite, dès notre arrivée au pied du courant ascendant, la rotation montre que la tornade ne saurait tarder. Et en effet, quelques minutes plus tard, un contact au sol est visible alors que la cellule s’éloigne de notre point de vue, tandis que des grêlons géants tombent à quelques kilomètres de notre position. Heureusement que nous ne subissons pas ces grêlons car ils sont encore plus gros que la veille, battant même le record du Texas avec 18 centimètres de diamètre !

On poursuit ensuite le mésocyclone à toute allure en s’engouffrant dans une dirt road pour arriver face à une tornade parfaitement condensée qui se dévoile en face de nous dans un champ. Nous sortons immédiatement pour immortaliser ce moment sur nos appareils. Après quelques minutes, le tourbillon pourtant bien constitué se dissipe étonnamment d’un coup, mais le nuage-mur continue de soulever de la poussière au sol.

Dès lors, on se repositionne plus loin, de l’autre côté de la ville de Silverton, et peu avant notre arrivée, une autre tornade se développe. Celle-ci est beaucoup plus durable et dure environ un quart d’heure, ce qui nous permet de pleinement en profiter en compagnie de nombreuses autres équipes, mais aussi avec des habitants du coin. De plus, une tornade jumelle est visible temporairement, bien que non condensée entièrement. Ensuite, après sa dissipation, l’orage est complètement déstructuré, mais il semble vouloir se réorganiser.

Puis, nous nous déplaçons à un autre point de vue, en bordure du Caprock Canyon, alors que la rotation s’accélère à nouveau. Malheureusement, cette fois-ci, rien ne se passe, et on regarde s’éloigner la cellule sur le canyon, alors que le rideau de grêle déverse encore ses grêlons sur la seule route qui le traverse, ponctué de quelques coups de foudre. Nul doute que notre toute nouvelle voiture, récupérée quelques heures auparavant, aurait été détruite si nous tentions de poursuivre l’orage.

Pour terminer la journée, nous rencontrons fortuitement l’équipe de Reed Timmer à la pompe à essence de Silverton, pour discuter et manger un burritos. Nous apprenons que le célèbre Dominator est resté embourbé dans un chemin, vitres brisées par la grêle et embrayage détruit. Enfin, après cette belle réussite, nous rentrons à Childress pour prendre un motel, et qui plus est, dans des heures raisonnables, pour une fois.

Nous sautons ensuite à la journée du 7 juin. Après quelques jours plus décevants, nous voilà prêts pour une traque au Nebraska. Une première cellule est interceptée près de la ville de Dunning. En pleine intensification, elle lâche, pour commencer, des coups de foudre intenses et assez proches. Après un repositionnement sur une petite route encombrée de traqueurs, et par chance, carrossable, l’orage atteint son plein potentiel.

En effet, une structure parfaitement élaborée se développe en face de notre point de vue. La rotation du mésocyclone s’intensifie de plus en plus, tandis que les bases nuageuses se rapprochent du sol. Avec un tel spectacle, nous avons difficile à détourner les yeux, si bien que nous finissons par nous retrouver seuls sur le point de vue, en bordure des précipitations, tellement nous avons du mal à nous détacher de ce qui se joue sous notre regard. Cependant, lorsque les premiers grêlons commencent à tomber, nous sommes bien obligés à nous résoudre de partir.

Sauf que la cellule décide d’accélérer son déplacement au même moment, de sorte qu’il nous est impossible de la devancer. Ainsi, nous restons au contact du mésocyclone, sur la seule route disponible, qui serpente dans les vertes étendues du Nebraska. N’arrivant pas à prendre de l’avance, nous observons même d’intenses rotations au-dessus de notre voiture. Si une tornade survient, nous serions aux premières loges. Malheureusement (ou pas, selon les sensibilités), aucun tourbillon ne se forme, mais l’ambiance est dantesque.

Par exemple, lors d’un arrêt rapide pour mieux observer ce qui se joue au-dessus de nous, nous voyons une personne rentrer tranquillement chez elle et s’arrêter à notre hauteur pour prendre le courrier de sa boite aux lettres. Totalement inconscient de ce qui se trame, ce monsieur se demande ce que nous regardons, et il lève alors les yeux vers le ciel. Après un moment de stupéfaction, il remonte en vitesse dans sa voiture et il prend la route à toute vitesse. Un moment insolite de notre voyage, parmi d’autres.

Plus loin, nous finissons par reprendre des routes rapides, avec un repositionnement devant une autre cellule bien active car la nôtre s’éloigne du réseau routier. Néanmoins, la structure qui se présente est bien élaborée, avec un arcus très dessiné, et cette fois encore, on a le sentiment que la tornade est proche. On décide de se déplacer vers la ville de Broken Bow pour capturer des images du RFD, mais l’orage se déplace vite. Ainsi, c’est en suivant la cohorte des traqueurs, sous une pluie de petits grêlons, que nous atteignons difficilement un car-wash pour nous protéger. C’est le chaos total et beaucoup de conducteurs paniqués cherchent un abri au plus vite.

On subit alors les éléments très rapidement, avec des vents violents et d’intenses précipitations. Une fois le calme revenu, nous traversons la ville pour observer les dégâts, pensant que la journée est terminée. Ainsi, de nombreuses inondations de voiries se présentent, et des arbres ou des branches brisées entravent la circulation.

Après un retour au car-wash pour un trépied oublié, on prend la route pour rejoindre un motel, alors que le système orageux est à présent hors de portée. Cependant, après un certain temps, on remarque qu’une petite cellule se forme à côté de nous, pas encore visible sur les radars. Elle lâche rapidement de puissants coups de foudre, et nous décidons de faire un arrêt pour l’observer. De plus, la foudre ne cesse de frapper, montrant une intensification de l’orage.

Après un repositionnement, une tempête de poussière se forme sur notre position avec l’arrivée brutale de fortes rafales de vent, totalement inattendues. Et c’est avec une visibilité fortement réduite que nous atteignons la ville de Holdrege pour capter ces instants. Pour finir, l’orage s’éloigne, mais nous persévérons à le suivre, à travers d’intenses précipitations et de fortes rafales de vent, qui manquent de peu de renverser le camion qui nous précède sur la route.

Mais face à l’impossibilité de traverser l’orage, nous le laissons s’éloigner au soleil couchant. C’est alors que l’activité électrique se dévoile à l’arrière du système. Celle-ci se montre incessante, et nous profitons de cette ambiance extraordinaire dans les couleurs du couchant, avant de définitivement arrêter la traque pour rejoindre un motel à Lexington.

Nous voici à la fin de notre rétrospective. Pour conclure, comme vous l’avez aperçu, notre voyage fut une belle réussite malgré une mise en route très difficile au début de notre séjour. Surtout après notre séjour en 2019, qui fut très difficile à cause de structures presque inexistantes, des pluies très présentes et une maladie qui nous aura suivi durant tout le séjour. Cette année, ce fut totalement l’inverse, avec le plein de structures et des phénomènes bien présents dont la grêle fut de loin le plus impressionnant, car tous les jours, nous avions la possibilité de l’observer. Enfin, nous avons parcouru 9450 miles durant notre séjour, soit 15120 kilomètres en trois semaines.