Le mois de septembre 1902 s’inscrit dans les moyennes mensuelles en Belgique. Toutefois, de grandes disparités sont observées. D’une part, la première moitié du mois est plus chaude que la normale, avec presque tous les jours des orages observés quelque part sur le pays du 1er au 13 du mois. D’autre part, la seconde moitié de ce mois de septembre voit des températures plus basses que la normale avec parfois des gelées sur le sud du pays, sous un vent de nord-est.
Au niveau pluviométrique, Uccle recueille 72 mm (dont 30,8 mm le 10 septembre lors d’un orage) alors que la majorité des stations enregistrent moins de 50 mm, voire moins que 30 mm pour certaines, preuve de la grande disparité des précipitations. Les maximas sont pour la province de Liège avec La Roche qui affiche 135 mm et Tilff 116 mm.
Le 3 septembre 1902, au lendemain de la tornade dévastatrice de Kortemark, un autre phénomène orageux cause des dégâts, dans le centre du pays cette fois-ci. D’après les descriptions, il semblerait qu’une tornade masquée par les précipitations a sévit de Neerheylissem (de nos jours Hélécine, en Brabant Wallon) aux environs de Saint-Trond, en province de Limbourg, avec une intensité assez forte, estimée au niveau F2 minimum (projection d’arbres à distance, maisons détruites, etc.).
On notera que le maximum de température du mois est atteint lors de cette journée, avec 26,3°C à Uccle. Voici à présent quelques descriptions de l’évènement :
Albert Lancaster : « Des orages sont signalés sur une grande partie du pays, peu forts en général, sauf en Hesbaye et dans la région de Saint-Trond, où ils ont été accompagnés d’une sorte de trombe qui a occasionné d’assez nombreux dégâts.
La bourrasque a passé au-dessus des villages de Neerwinden, Laer, Elixem, Wanghe, Halle et sur la ville de Saint-Trond, c’est-à-dire qu’elle a suivi la direction SO-NE et le cours de la Petite Geete, de Neer Heylissem (au nord-est de Jodoigne) à Léau (à l’ouest de Saint-Trond). Des centaines d’arbres ont été arrachés par le vent ».
« Un cyclone en Hesbaye.
De notre correspondant de Tirlemont, le 5 :
Un effroyable cyclone passant comme une trombe a dévasté avant-hier toute une partie de la Hesbaye.
De mémoire d’homme on n’a jamais rien vu de semblable ici. Ayant voulu me rendre compte de visu des dégâts causés par le terrible ouragan, je n’ai pu envoyer plus tôt ce compte rendu. C’est un véritable cataclysme transformant en quelques minutes une riche et opulente contrée en un violent désert.
La trombe a passé au-dessus des villages de Neerwinden, Laer, Elixern, Wanghe, Overhespen, Neerhespen, Orsmael, Dormael, Halle. Ces localités présentent un aspect des plus lamentables. Des centaines d’arbres ont été partout arrachés et lancés comme des fétus de paille à des distances incroyables.
A Wanghe, la foudre a frappé la grange du sieur V, en y causant de sérieux dégâts. A Neerheylissem, trois maisons ont été détruites. A Halle, la laiterie s’est effondrée comme un jeu de cartes. Les baraquements de la foire de Saint-Trond ont été enlevés en partie par l’ouragan. Un lourd chariot chargé de moisson a été renversé à Neerwinden sans blesser, heureusement, le conducteur.
Le cyclone était accompagné d’un bruit assourdissant couvrant le roulement du tonnerre. Des paysans surpris en pleine moisson se sont trouvés comme asphyxiés au passage du phénomène et ont dû se coucher à plat par terre.
Chez beaucoup de braves gens le bétail effaré a brisé ses attaches et s’est enfui à travers les champs. C’est un vrai miracle que nous n’ayons pas de mort à déplorer. Bien des paysans pleurent et font pitié à voir ; l’un sanglote devant sa maison qui n’a plus rien d’habitable, un autre contemple avec désespoir les restes d’une meule dont les gerbes se sont dispersées aux quatre vents ; celui-là pleure l’absence d’une vache balayée par le vent… C’est la ruine pour bien des familles » (Journal de Bruxelles 6/09/1902)